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Israël ne doit pas décider seul
Par Natan Sharansky - Jerusalem Post | Adaptation française de Sentinelle 5768 ©
Article mis en ligne le 21 janvier 2008
dernière modification le 22 janvier 2008

Au cours de mes neuf années au sein de gouvernements israéliens, j’ai servi comme ministre dans différentes fonctions. Dans chaque cas, les négociations nécessaires à la coalition pour gagner chaque position étaient ardues, certaines fois même épuisantes. Il n’y a qu’une position que j’aie reçue comme un cadeau, car elle était incontestée : le poste de président du comité interministériel pour les affaires de la Diaspora.

En effet, pourquoi devrait-il y avoir une bagarre pour un poste dénué de budget, de positions, et sans influence ni importance politiques ?

C’est vrai, le comité traite d’un sujet important - le dialogue et la coordination d’efforts avec les communautés juives de Diaspora. Mais qui cela intéresse-t-il vraiment ?

Sans surprise, donc, la question de savoir comment une décision donnée pourrait influer sur les Juifs de Diaspora n’est pratiquement jamais parvenue en délibération au Conseil des ministres. Et quand cela survenait, c’était seulement dans le contexte de savoir comment la décision pourrait influencer l’aliya*. L’idée d’inclure des représentants de la Diaspora dans le processus d’une prise de décision était considérée parfaitement ridicule.

Aujourd’hui, alors que le gouvernement du Premier Ministre Ehud Olmert s’apprête à commencer des négociations avec Mahmoud Abbas sur des questions clés, dont le sort de Jérusalem, le débat sur le rôle des Juifs de Diaspora dans le processus de prise de décision devient de plus en plus animé. Mais la vraie question est bien plus vaste : est-ce que l’Etat d’Israël appartient seulement à ceux qui y vivent, et donc est l’Etat de tous ses citoyens, ou a-t-il été établi aussi pour assurer la pérennité de tout le Peuple juif, et le rassemblement à Sion ?

Dans sa lettre ouverte à Olmert, Ronald Lauder, président du Congrès Juif Mondial, a appelé le Premier Ministre à consulter les Juifs de Diaspora avant que le gouvernement d’Israël ne prenne une décision sur l’avenir de Jérusalem. En réponse, Schlomo Avineri, dans un éditorial de ‘Une’ dans ce journal, a rejeté l’appel et répété la thèse en deux parties bien connues : 1 - Nous sommes un Etat souverain ; et 2 - Qui êtes-vous, de toute façon, vous qui prétendez représenter la Diaspora ? Peut-être aussi, dans votre grande audace, insisterez-vous pour être interrogés sur des questions telles « Qui est un Juif ? » et d’autres relatives à la religion et à l’Etat ?

Schlomo Avineri a délibérément introduit ces questions pour illustrer un raisonnement par l’absurde, mais selon moi, elles ne sont pas du tout absurdes. Au contraire : Ca a été précisément des question telles « Qui est Juif ? » qui ont fait comprendre aux dirigeants d’Israël l’impossibilité de prendre de telles décisions sans prendre en compte les avis des communautés juives de Diaspora.

La commission Ne’eman, que j’ai eu l’honneur de coordonner avec un représentant du gouvernement, a consacré de nombreuses heures en discussions avec des représentants de la Diaspora. Il n’y a pas eu un seul organisme élu avec lequel il a été possible de débattre et de prendre des décisions. Certaines fois, ça a été des représentants de mouvements et d’organisations de tutelle ; d’autres fois, telle synagogue ou telle fédération.

Le compromis obtenu à la fin n’a pas conféré un sentiment de triomphe à quiconque. Mais plutôt, il a pris en compte les préoccupations existentielles de nombreuses communautés différentes et, ce faisant, leur a donné un sentiment d’implication dans une décision si cruciale pour elles.

Parmi les décisions qui peuvent affecter notre Peuple dans sa totalité, pour le bien ou le mal, l’avenir de Jérusalem est peut-être la plus importante. Jérusalem n’est pas seulement la capitale d’un Etat souverain. Elle est une partie intégrale de l’identité de tout le Peuple juif.

Des milliers d’années de prières, de larmes et d’espoir ; de désir ardent pour Jérusalem - incarné dans la promesse intemporelle : « Si je t’oublie Ô Jérusalem, que ma main droite se flétrisse » - tout cela reflète la place unique de Jérusalem dans le cœur juif.

Nous Juifs de Russie avons ressenti cette place spéciale, le coeur de notre identité, quand le cri de Motta Gur** : « Le Mont du Temple est entre nos mains ! » a percé le rideau de fer, et nous a éveillés de notre sommeil.

Il n’y a aucun de doute que l’Etat a le droit de prendre des décisions sur l’avenir de Jérusalem. Mais il n’y a pas de doute non plus qu’une éventuelle décision de l’Etat d’Israël - pour la première fois dans l’histoire juive - d’abandonner le cœur même de la ville sainte, influencera l’histoire de générations de Juifs, leur relation avec le Peuple juif, et leur perception d’un destin commun.

Pour ceux qui doutent que, en effet, le coeur même de la cité est en jeu, je recommanderais le rappel de ce qui est arrivé à Camp David, quand les représentants de l’Etat d’Israël ont révélé leur volonté d’abandonner le Mont du Temple, et la controverse porta sur : « Qui allait garder le Mur Occidental ? » - Tsahal ou bien des forces multinationales, avec un accès pour les Juifs par des transports organisés ?

Il est facile d’être cynique sur l’absence de direction reconnue au sein des communautés juives de Diaspora. Mais exactement comme dans le cas de la commission Ne’eman, les Juifs de Diaspora ont le droit de participer de sorte que les décideurs soient engagés à prendre en compte leur opinion. Pas plus - mais aussi pas moins - parce que autrement, la seule voix décisive qui sera entendue dans les discussions sur le destin du Peuple juif sera l’argument de la survie de la coalition [gouvernementale actuelle Ndt].

La dernière fois que la survie de Jérusalem s’est trouvée sur la table de négociations, c’était il y a sept ans à Camp David. Quand Arafat entendit la proposition de diviser la ville, il déclara que puisque Jérusalem appartenait à tous les Arabes et aux Musulmans, il n’avait pas le droit de prendre la décision sur l’abandon seul - et que doc il devait consulter la Ligue Arabe et musulmane.

Peu de temps après, quand je reçus un appel téléphonique d’Ehud Barak (je n’étais pas le seul politicien qu’il appelait de Camp David), je lui demandai : « Pourquoi Arafat perçoit-il que Jérusalem appartient à tous les Arabes ? Pourquoi se sent-il obligé de consulter la nation arabe entière, alors que le gouvernement d’Israël ne reconnaît pas une telle obligation envers son Peuple, et ne ressent pas même le besoin de consulter les communautés juives de Diaspora au sujet d’une décision aussi fatidique » ?

Malheureusement, j’attends toujours une réponse.


L’auteur, Président de « l’Institut Adelson pour les Etudes Stratégiques », a servi comme ministre et premier ministre adjoint d’Israël dans des gouvernements successifs.


http://www.jpost.com/servlet/Satellite?pagename=JPost%2FJPArticle%2FShowFull&cid=1200572492459


Notes du traducteur :

  • Aliya : montée des Juifs en Israël
    **Motta Gur : commandant en chef des troupes parachutistes qui libérèrent Jérusalem Est en juin 1967.


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