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Une visite bien troublante
Par Huguette Chomski Magnis, présidente du Mouvement pour la paix et contre le terrorisme.
Article mis en ligne le 19 juillet 2007

Comme le souligne Huguette Chomski Magnis, avoir invité en France les terroristes du Hezbollah « entérine une forme de déréglementation politique où droit international et droit humanitaire sont bafoués en toute impunité. Cela envoie implicitement un message dangereux à toutes les organisations terroristes : le terrorisme paie.» (B.C.)

Existait-il une autre solution que d’inviter le Hezbollah sur notre sol ? Entre logique de guerre et désir de paix, existe-t-il une voie qui ne passe pas par le compromis avec le Hezbollah ? En d’autres termes et plus généralement, existe-t-il face au terrorisme une alternative, non militaire mais politique, à l’accommodement ?

C’est parce que nous le pensons que nous avons fondé le Mouvement pour la paix et contre le terrorisme. Cette autre voie porteuse d’espoir mais encore inexplorée est celle d’une mobilisation de l’opinion, française, européenne, internationale pour condamner toute pratique terroriste. Oser dire ce que l’on sait. Cela implique d’oser dire par exemple ce que nous savons du Hezbollah.

Force est de constater que l’on cache au contraire les faits. On ne rappelle pas les assassinats de Français commis par ce même Hezbollah dans un passé encore douloureusement proche. Il ne s’agissait pas d’intérêts occidentaux mais de vies humaines, françaises en l’occurrence ! On ne rappelle pas les attentats commis en Argentine en 1992 et 1994 (114 morts, 393 blessés). On ne publie pas les sermons incendiaires de Nasrallah. On ne montre ni les photos des défilés des milices du Hezbollah, bras levés à l’hitlérienne, ni celles des bambins embrigadés. On s’abstient de citer le contenu violemment antisémite des émissions d’al-Manar qui lui a valu d’être interdit de diffusion en France. On omet même le rôle, pourtant reconnu par l’ONU (1), du Hezbollah dans le déclenchement de la guerre de l’été dernier. Le Liban peine à se relever, Israël aussi d’ailleurs. Mais pas le Hezbollah et le voilà assez fort pour avoir été convié à La Celle-Saint-Cloud ?

Quelle réaction ? Certes, un rassemblement a eu lieu dimanche dernier à l’initiative de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), initiative à laquelle nous avons apporté notre soutien. S’il faut la saluer, on ne peut que s’étonner de la faiblesse de la représentation citoyenne dans l’organisation de la riposte. Protester contre la venue du Hezbollah ne concernait-il que les seules familles des victimes françaises du Hezbollah ? Ou que les Juifs de France, présumés seuls sensibles à la question des soldats israéliens détenus au secret depuis un an ?

Cette indifférence entretenue de l’opinion nourrit à son tour l’échafaudage de plans diplomatiques empreints de prudente real politik : il faut « faire avec » le Hezbollah, comme le font les Libanais eux-mêmes. Nous ne les aidons pas à faire sans !

Certes, la France est l’amie du Liban mais les amis ne sont pas toujours bons conseillers. Nous n’aidons pas plus les Libanais à faire sans le Hezbollah que nous ne les avons aidés à faire sans la Syrie.

Ce n’est pas la France qui a brisé le tabou de l’occupation syrienne du Liban mais les Libanais eux-mêmes en engageant la « révolution du Cèdre » et le mouvement du 14 mars.

Quelle est la position française vis-à-vis du Hezbollah ? On reste perplexe devant les déclarations contradictoires de nos autorités politiques. L’examen attentif de ces déclarations successives conduit à quelques interrogations : comment une organisation à laquelle on demande de « renoncer à l’action terroriste » pourrait-elle ne pas être terroriste ? Comment peut-on qualifier une organisation de terroriste mais ne pas souhaiter son inscription sur la liste européenne des organisations terroristes ? Comment peut-on avoir pour objectif que le Hezbollah redevienne ce qu’il n’a jamais été, un « parti libanais qui joue le jeu de la démocratie parlementaire libanaise » ?

Le choix d’inclure Hezbollah et Amal dans la rencontre de La Celle-Saint-Cloud nous semble grave à plusieurs titres : cela décrédibilise encore un peu plus l’ONU puisque preuve est faite qu’on peut rester un interlocuteur, invité par la France, tout en refusant de se plier aux conditions fixées par une résolution du Conseil de sécurité.

Cela entérine une forme de déréglementation politique où droit international et droit humanitaire sont bafoués en toute impunité. Cela envoie implicitement un message dangereux à toutes les organisations terroristes : le terrorisme paie.

Au niveau régional, cela freine les Libanais qui voudraient se libérer de l’étreinte terrible du Hezbollah et cela conforte objectivement un ferment de guerre entre le Liban et Israël.

On aurait à la rigueur pu admettre que la diplomatie française utilise l’invitation comme une « carotte » : « si vous libérez les deux soldats » ou même « si vous laissez la Croix-Rouge leur rendre visite, alors... », car tenter de sauver des vies peut justifier bien des compromis.

Il n’en a rien été. Le Hezbollah a été invité sans avoir à répondre à la moindre exigence. Et le trouble demeure.

(1) Résolution 1701 du Conseil de sécurité.



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