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Leçon numéro Un pour le Musulman moderne : Rappelle-toi, nous ne sommes pas au 8ème siècle.
Par Salman Rushdie
Article mis en ligne le 15 septembre 2005

Il y a quelques semaines, dans un article écrit en réponse aux attentats à la bombe de Londres, j’ai écrit au sujet du besoin urgent d’un « mouvement de réforme pour porter les concepts au cœur de l’Islam dans les temps modernes ».

La réponse à cet article a été large et extrêmement intéressante. Naturellement il y a eu ceux qui se sont précipités pour repousser mes arguments parce qu’ils proviennent de ma bouche. « L’homme qui a perdu sa personnalité et ses croyances ne devrait pas parler au sujet de la grande religion qu’est l’Islam » a écrit Anna Tanha, de Glasgow.

Cependant, il y a eu un intéressant flot de commentaires plus positif, le plus souvent en provenance de Musulmans. « Parfaitement vrai, il est temps que les Musulmans acceptent que ce sont les attitudes de l’Islam du 8ème siècle qui provoquent tant de souffrances dans le monde du 21ème siècle », a écrit Mohammed Iqbal, de Leeds, le lieu d’origine de trois des sept démocides à la bombe. « De grâce, laissez le dogme de côté, et faites place à la raison dans le débat. Nous autres fidèles en avons assez fait pour notre propre mal. Ce que les monarques et le clergé européens ont fait dans les temps sombres et au Moyen-Age, c’est exactement ce que les dirigeants et le clergé musulmans font au monde musulman », a avancé Nadeem Aktar, de Washington D.C.

Ozcan Keles, de Londres, a insisté pour que seuls « des dirigeants musulmans s’appuyant sur la foi » puissent réaliser l’acte de réinterprétation coranique dénommé « Itjihad’ », mais Haroon Amirzada, un ancien conférencier à l’Université de Kaboul, a perçu que « des érudits musulmans et non musulmans laïques, occidentaux et orientaux, et des politiciens, devraient travailler ensemble pour moderniser l’Islam de façon à rejoindre les réalités de notre époque.

Le Dr. Shaaz Mahboob, de Hillington dans le Middlesex, a souligné qu’il y a des centaines de milliers de Musulmans en Grande Bretagne, qui ne veulent pas suivre leur religion aussi strictement que le font les générations plus anciennes ... Nous sommes la majorité des Musulmans, enclins à vivre en paix et en harmonie avec les autres groupes religieux, nous sommes fiers d’être britanniques et patriotes ... Je ne connais aucune organisation qui représente l’Islam laïc et libéral que suit la vaste majorité des Musulmans » .

Plusieurs écrivains m’ont mis au défi de proposer la prochaine étape, et d’émettre une hypothèse sur le contenu d’un tel mouvement de réforme. Les neuf réflexions qui suivent constituent une réponse initiale à ce défi, et sont orientées d’abord sur la Grande Bretagne.

Il se pourrait bien que la réforme naisse dans la diaspora musulmane où le contact (et la friction) entre les communautés est plus grand, puis exportée vers les pays à majorité musulmane. Ce ne serait pas la première fois que qu’une telle chose se serait produite. L’idée du Pakistan a pris forme en Angleterre, aussi. De même les personnalités capables de changer le cours de l’histoire comme le Mahatma Gandhi ; le fondateur du Pakistan, Muhammad Ali Jinnah ; et le dirigeant musulman pro-britannique Sir Syed Ahmad Khan.

Les Musulmans britanniques, qui sont surtout d’origine sud-asiatique, devraient se souvenir de leur propre histoire. En Inde, les Musulmans ont toujours été laïcs, sachant que la constitution laïque de l’Inde est ce qui les protège de la dictature de la majorité (hindoue). Les Musulmans britanniques devraient s’inspirer du livre du leurs contreparties et séparer la religion de la politique.

Se rappeler de l’histoire, deuxième partie. De mémoire vivante, des villes musulmanes comme Beyrouth et Téhéran étaient des métropoles modernes, cosmopolites, tolérantes. Cette culture perdue doit être sauvée à l’encontre des radicaux, célébrée, et reconstruite.

L’idée que tous les Musulmans sont parents de tous les autres doit être réexaminée. La vérité est que, comme les divisions amères entre les Sunnites et les Chiites irakiens le démontent, c’est une fiction, et quand cela trompe des jeunes hommes tels que les démocides à la bombe du 7 juillet [2005] au point de se faire exploser dans leur propre pays au nom d’une idée essentiellement incroyable de la fraternité islamique (peu de Musulmans britanniques trouveraient tolérable la vie dans des pays musulmans conservateurs. C’est une fiction dangereuse.

Pani-Islamisme, deuxième partie : Les gens les plus directement blessés par l’islamisme radical sont d’autres Musulmans : les Afghans par les Talibans, les Musulmans iraniens sous la férule des Ayatollahs ; En Irak, la plupart des gens tués par l’insurrection sont des Musulmans, également. Encore des Musulmans.

La rhétorique se concentre sur les crimes de « l’Occident ». Il se pourrait que les Musulmans aient besoin de rediriger leur rage contre ceux qui les oppriment et les tuent vraiment.

Dans les années 1970 et 1980, les politiques des sujets britanniques originaires d’Asie du Sud étaient essentiellement organisées autour de groupes laïcs, surtout dirigés par des activistes de conviction marxiste-gauchiste. L’unité noire / asiatique de cette époque fut brisée, et remplacée par un Islam radical déterminé par la foi, fondé sur la mosquée, qui fit excroissance en partie contre les Versets sataniques. 
Cette base doit être reconquise (pas nécessairement par les marxistes-gauchistes) en créant de vrais organismes représentatifs. Alors, les « dirigeants » de plus en plus discrédités du Conseil Musulman de Grande Bretagne pourront être relégués aux marges auxquelles ils appartiennent.

L’Islam réformé devrait rejeter le dogmatisme conservateur et accepter que, entre autres choses, les femmes soient pleinement l’égal des hommes ; que les personnes d’autres religions, ou sans religion, ne soient pas inférieures aux Musulmans ; que des différences d’orientation sexuelle ne soient pas condamnées, mais acceptées comme des aspects de la nature humaine ; que l’antisémitisme n’est pas acceptable ; et que la répression de la libre expression par l’idéologie ultra-susceptible prenant facilement « offense » soit remplacée par un débat authentique, solide, où qu’il aille, dans lequel il n’y aura aucune idée interdite, ni de zones où on ne puise accéder.

L’Islam réformé encouragerait les Musulmans de la diaspora à sortir de leurs ghettos auto-imposés, et à cesser de tant se soucier d’enfermer leurs filles. Il sortirait du ghetto intellectuel du mot à mot et de la servilité envers les mollahs et les oulémas, autorisant l’émergence d’une érudition ouverte, fondée historiquement, hors des ombres dans lesquelles les madrassas et les séminaires l’ont condamnée.

Il doit y avoir une fin à la paranoïa défensive qui a conduit certain Musulmans à affirmer que les Juifs étaient derrière les attaques du 11 septembre, et plus récemment, que les Musulmans pourraient ne pas avoir été non plus derrière les attentats à la bombe du 7 juillet (cette théorie cinglée a explosé, si l’on peut dire, sur une vidéo récente d’al-Jazeera).

Ce n’est pas tant une Réforme, comme plusieurs l’ont dit en réponse à mon premier article, plutôt un siècle des Lumières. Fort bien alors : Que la lumière soit !


http://www.timesonline.co.uk/article/0,,1072-1775943,00.html

Adaptation française de Simon Pilczer, volontaire de l’IHC



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