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Le deal
Par Sami el-Soudi © Metula News Agency
Article mis en ligne le 26 mai 2004

La région bouge sous l’impulsion d’un accord d’envergure, alliant les Etats-Unis, Israël, certaines composantes de l’Autorité Palestinienne ainsi que l’Egypte et la Jordanie. Et pour la première fois, ces deux pays ont accepté de jouer un rôle actif, aux côtés d’Israël, coordonné avec le gouvernement Sharon, dans l’application - il serait plus précis d’écrire l’imposition - de cet accord.

L’existence de cette large entente n’est plus désormais qu’un secret de polichinelles, mis à part des détails d’application, dont je me propose de vous livrer un aperçu dans cet article. Quant aux grandes lignes de l’accord, elles font l’objet de communiqués semi-officiels en Egypte, en Israël mais également dans l’entourage de Yasser Arafat.

Autrement, il convient de préciser que le nouveau plan n’entend pas régler le conflit israélo-palestinien mais que ses partenaires se sont fixés pour but la réalisation des conditions liminaires prévues par la Carte Routière. En d’autres termes, il s’agit de la neutralisation des organisations terroristes, de la cessation des violences et de la réforme en profondeur de l’Autorité Palestinienne. Côté israélien, Ariel Sharon s’est engagé à évacuer l’ensemble de la bande de Gaza et à y démanteler toutes les implantations juives, lors de l’application de cet accord.

Reste que l’élément le plus spectaculaire de la nouvelle entente réside dans la mise au vert du Chairman de l’Autorité Palestinienne, qui obtiendra le titre aussi officiel que purement honorifique de Président. Le chef effectif du gouvernement palestinien deviendra son premier ministre, qui détiendra quasiment tous les pouvoirs.

La démarche décisive dans l’application de la résolution des nouveaux alliés fut sans conteste, à ce jour, la visite rendue par le chef des renseignements égyptiens, le général Omar Suleiman, lundi dernier à Ramallah et à Jérusalem. A cette occasion, le général égyptien a « signifié » à Arafat les grandes lignes de l’accord et lui a annoncé qu’il allait bientôt avoir à nommer Mohamed Dahlan au poste de Premier ministre et lui transmettre les pleins pouvoirs. Arafat a demandé à Suleiman : « Et si je refuse ? » ce à quoi l’officier de Moubarak lui a répondu : « Les changements se feront avec ou sans votre assentiment » en ajoutant « si vous faites des histoires les choses se dérouleraient d’une manière très désagréable et complètement inutile pour vous, et qu’il ne serait alors pas assuré d’être le premier président de l’Etat palestinien à naître. »

La rencontre s’est déroulée dans une atmosphère tendue mais correcte. A l’issue de celle-ci, Arafat a demandé à recevoir l’assurance de Sharon, que s’il acceptait les termes du diktat, il pourrait se déplacer à sa guise et cesserait d’être confiné à la Moukata. Arafat a exigé de recevoir une réponse directe du Premier ministre israélien, assortie des garanties du Président Moubarak quant à son exécution. Après un second entretien très discret avec Sharon et une longue consultation téléphonique entre le Président du Conseil israélien et le Président d’Egypte, Ariel Sharon a diffusé le communiqué mis au point lors de la conférence téléphonique : Israël garantira à Yasser Arafat une entière liberté de mouvements, aux conditions que les forces palestiniennes soient réunies sous un commandement unique et que cessent les violences contre les Israéliens.

Hors publication officielle, deux conditions supplémentaires ont été communiquées à Arafat : 1) Qu’il ne se mêle en aucune façon de la direction politique et militaire de l’AP et 2) qu’il s’abstienne absolument de gêner l’action, ou de la concurrencer, des premiers ministres palestiniens.

Notons que la concentration des forces armées palestiniennes sous un commandement unique a constitué l’exigence principale de Mahmoud Abbas, l’ex-premier ministre, évincé par le raïs, et de Mohamed Dahlan, alors ministre responsable de la sécurité et qu’Arafat avait toujours rejeté leur revendication. Dans les faits, la réunion des forces de sécurité sous un commandement unique confère à l’Autorité Palestinienne les moyens de combattre le terrorisme et partant, d’assurer un cessez-le-feu, la neutralisation du Hamas et du Jihad et d’engager le processus provisionné par la Carte Routière.

Si Arafat n’a pas donné à Suleiman de réponse officielle, ce matin, des sources semi-officielle dirigées par le maître d’hôtel de la Moukata, Abou Rodeina, informaient la presse « qu’un plan était en gestation et qu’il inclut des mesures concrètes concernant l’Autorité Palestinienne et son Chairman. »

Pour avoir longtemps fréquenté Arafat, je dis que rien n’est fait avant que les choses ne se réalisent effectivement. Le reclus de la Moukata peut encore changer dix fois d’avis avant l’échéance fatidique et présenter des listes de nouvelles exigences, plus inacceptables les une que les autres. Il semble cependant, de par la solidité et la détermination de la coalition à laquelle il fait face, que le Vieux a compris que cette fois, ses tours de singe roublard ne pourront infléchir vers la guerre les décisions en faveur de la paix qui furent prises sans lui.

Mohamed Dahlan, qui n’occupe officiellement aucune fonction au sein de l’Autorité Palestinienne, a fait publiquement savoir, sur une TV arabe, à ce qui reste du Hamas et du Jihad que « s’ils poursuivaient les violences après l’évacuation de Gaza par les Israéliens, cela créerait une fissure profonde entre ces deux organisations et l’Autorité Palestinienne. » Inutile de mentionner aux lecteurs avisés de la Ména que Dahlan s’exprime déjà comme s’il était investi des fonctions de premier ministre. De manière moins voyante, Dahlan et les émissaires égyptiens ont d’ailleurs fait savoir aux islamistes armés que s’ils ne respectaient pas les injonctions du prochain chef de l’AP, ils seraient réduits en poussière.

C’est ici aussi l’endroit de mentionner à quel point la plupart de nos collègues journalistes n’entendent rien aux dynamiques en présence dans notre région. Eux qui prophétisaient une recrue d’essence extraordinaire de la violence et une réaction terrible du Hamas à la neutralisation de Yacine et de Rantissi… et nous qui vous assurions que ces éliminations ciblées par les Israéliens étaient efficaces, désorganisatrices pour les terroristes et coordonnées avec les services de Dahlan. Résultat des courses : Les organisations fanatiques religieuses ont été incapables de mener à terme le moindre assassinat-collectif depuis l’élimination de Yacine. Pourtant, on n’a vu aucune des pythies de mauvais augures remettre son tablier et retourner à l’école de journalisme.

En plus de ces mesures très exceptionnelles, la Jordanie, dont le souverain fut la première source institutionnelle arabe à cafeter l’existence du plan (des mois après Sami el-Soudi Ndlr.), va commencer à former des éléments des nouvelles forces de sécurité palestiniennes. Ce sera à partir du 15 juin et ça se passera à Jéricho, avec la bénédiction de l’armée israélienne. L’Egypte, quant à elle, s’est engagée à prendre des mesures concrètes en vue de mettre fin à la contrebande d’armes dans la région de Rafah et de la Voie Philadelphie. Il est prévu entre les parties, que si les forces du Caire se montraient enfin efficaces dans cet exercice, et après mise à l’épreuve empirique, Israël pourrait renoncer à maintenir Tsahal sur la frontière internationale.

Gros chambardement en perspective donc. Faute de disposer des réserves d’enthousiasme nécessaires à sauter de joie, nous distinguons l’esquisse d’une lueur positive qui éclaire le crépuscule. L’événement le plus significatif de cette évolution, ce pourrait être la résolution prise par les gouvernements arabes - modérés dans leurs déclarations à Tunis - d’adopter des dispositions réalistes et efficientes pour solutionner la dispute israélo-arabe.



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