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Tous les prétextes sont bons pour crier au loup…..
Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 24 février 2010
dernière modification le 26 février 2010

On ne pourra pas reprocher à Benyamin Netanyahou de gouverner sous la pression des événements, ce qui ne signifie pas pour autant qu’il choisit toujours le bon moment pour prendre certaines initiatives. Mais cela n’autorise pas pour autant les excès de langage de la partie adverse. On sait que lors du dernier Conseil des ministres israélien, dimanche 21 février, le Premier ministre a déclaré « qu’il était d’accord pour inclure dans la liste des sites historiques israéliens le tombeau de Rachel et le caveau des Patriarches ».

Nous n’aurons pas l’outrecuidance d’insister sur la place de ces sites dans la tradition juive, mais il faut noter que leur emplacement géographique est de nature à poser problème.

En effet, d’une part, le tombeau de Rachel, la femme de Jacob, lieu de pèlerinage pour les Juifs, à l’occasion des grandes fêtes, est situé dans ce qui constitue une sorte d’ « enclave » israélienne, dans la ville autonome palestinienne de Bethléem (classée en zone A selon les accords d’Oslo). Ce qui explique qu’elle soit entourée d’un double mur.

Quant au « caveau des Patriarches » (situé selon la Bible à Ma’hpela) il se trouve dans la ville de Hebron, qui d’après un accord intérimaire signé en 1997, après le massacre de 29 Palestiniens par un excité israélien en 1994, aboutit à un partage de pouvoirs entre Israël et l’Autorité (rsic) palestinienne sur des zones distinctes. Juifs et musulmans le considèrent, en effet, les uns et les autres, comme un lieu saint, eu égard à la place d’Abraham, comme père du monothéisme.

Mahmoud Abbas, Président de l’Autorité (sic) palestinienne, que l’on se « plaît » à présenter comme un modéré n’a, pourtant, pas manqué l’occasion de monter sur « ses grands chevaux ».

De passage en Belgique, il a qualifié mardi de « provocation » la décision de Benyamin Netanyahou et mis en garde contre le risque de « guerre religieuse », comme si déjà, depuis des années de divers côtés, dans le monde musulman, on n’avait pas déjà appelé à la « guerre sainte » (djihad).

Dans le camp des extrémistes, le chef du gouvernement du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh, n’a pas hésité à appeler les Palestiniens de Cisjordanie « occupée » à « se soulever » pour défendre ces lieux saints, tandis que le mouvement chiite libanais Hezbollah a dénoncé « l’arrogance » d’Israël, estimant qu’il s’agissait « une fois encore d’une agression contre les lieux saints musulmans ».

Pas moins…..

L’Egypte et la Jordanie, les deux seuls pays arabes de la région à avoir signé un traité de paix avec Israël, ainsi que la Syrie ont également protesté après l’annonce de M. Netanyahou, tandis que le coordinateur de l’ONU pour le processus de paix, Robert Serry, s’est dit « préoccupé ».

Mercredi, lors du point de presse au Quai d’Orsay, la question n’a pas manqué d’être soulevée :

« Le gouvernement israélien a déclenché l’indignation dans le monde arabe en décidant de placer deux lieux saints de Cisjordanie, à Hébron et Bethléem, sur la liste des monuments historiques d’Israël……Comment réagit la France à cette politique contraire à sa recommandation aux parties de faire des gestes favorisant la confiance ? ».

Et le porte-parole du Quai de répondre : « Nous appelons à des gestes de confiance mutuels pour favoriser un climat positif. Les mesures auxquelles vous faites référence ne vont pas dans ce sens ».

Sans vouloir faire preuve d’un formalisme, voire d’un juridisme trop poussé, nous pensons que ces diverses réactions excessives confondent le moment choisi et le fond du problème.

On peut, effectivement, comme nous l’avons dit, au début de notre propos, s’interroger sur l’urgence pour le Premier ministre israélien de soulever la question de certains Lieux saints juifs, qui se trouvent, actuellement, en dehors des frontières de l’Etat d’Israël.

Mais, sur le fond, personne de bonne foi ne pourra contester aux Juifs, et donc au premier ministre d’Israël, de manifester un intérêt pour le sort de ces Lieux saints.

Cela ne signifie nullement, pour autant, que les Juifs entendent contester l’intérêt d’autres confessions pour certains de ces Lieux, chargés d’histoire et de spiritualité.

Bien plus, cela ne signifie pas non plus que les Israéliens entendent revendiquer, dans le cadre des négociations à venir, le droit d’exercer une souveraineté territoriale sur ces emplacements.

Simplement, ils nous paraissent parfaitement en droit de revendiquer une reconnaissance de cet intérêt, ce qui laisse sous-entendre qu’au cours de la négociation le droit pour les Juifs de continuer à venir prier sur ces Lieux devra être consacré et garanti.

Eventuellement, s’agissant, notamment de Hebron, il nous paraît évident que le droit pour des Juifs d’habiter aux abords de ces Lieux devra être tout autant reconnu.

Il serait inadmissible et scandaleux alors que, dans certains milieux, on se montre particulièrement sensible dans le domaine de la liberté religieuse que la société internationale contemporaine puisse accepter l’idée que certaines parties du globe seraient « exemptes de Juifs » (« judenrein » ), comme Hitler l’avait rêvé pour la terre entière.

Dans le fond, ce qui nous paraît plus grave c’est moins la maladresse de Benjamin Netanyahou, quant au choix du moment pour faire sa déclaration que l’ampleur et le caractère excessif de certaines réactions dans les milieux arabes.

Celles-ci nous semblent rappeler fâcheusement la théorie du Dar el Islam, prônée par certains idéologues musulmans, selon laquelle le Moyen-Orient est « terre d’Islam » et qu’il n’y aurait pas de place pour des entités étatiques non-musulmanes.

Entre la négation du droit des Juifs à pratiquer leur religion et la délégitimation de l’Etat d’Israël, la distance n’est pas très grande.



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