Bandeau
DESINFOS.COM
Slogan du site

Depuis Septembre 2000, DESINFOS.com est libre d’accès et gratuit
pour vous donner une véritable information indépendante sur Israël

Les Forces du 14 mars après la formation du nouveau gouvernement libanais. De la victoire électorale à la défaite politique et la désintégration en cinq mois 

Par : H. Varulkar | MEMRI Middle East Media Research Institute
Article mis en ligne le 10 décembre 2009

Le 7 Juin 2009, les Forces du 14 mars remportaient les élections législatives libanaises. Cinq mois plus tard, le 9 novembre 2009, l’opposition réussissait à renverser sa défaite électorale, avec l’approbation par le président libanais Michel Suleiman d’un gouvernement représentant une victoire pour l’opposition.

En outre, avec le nouveau gouvernement, la Syrie reprenait les rennes du Liban, cette fois dans le cadre d’un arrangement entre l’Arabie saoudite et la Syrie. Nicolas Nassif, chroniqueur du quotidien libanais d’opposition Al-Akhbar, commente : « Il est dorénavant clair pour toute la communauté internationale que la clé de la stabilité du Liban et de son régime ... se trouve entre les mains de son voisin [la Syrie]. » [1] 

Ci-dessous une analyse des raisons de ce revirement, au vu des concessions faites par les Forces du 14 mars. 


Comment les Forces du 14 mars sont passées de la victoire électorale à la défaite politique et à la désintégration 
1. Beyrouth tombe aux mains du Hezbollah en mai 2008 



La prise de Beyrouth et d’autres régions du Liban par le Hezbollah, le 7 mai 2008, ont eu et continuent d’avoir un impact profond sur la population libanaise, en particulier sur les leaders des Forces du 14 mars. Le fait que le Hezbollah ait retourné ses armes contre ses rivaux au sein du pays, et l’Accord de Doha du 21 mai 2008, conclu avec la médiation de pays arabes, qui a résolu la crise à l’avantage du Hezbollah, ont poussé les Forces du 14 mars à éviter toute nouvelle confrontation directe avec le Hezbollah - même au niveau politiqu e - de peur qu’il ne recoure une fois de plus à la force. Les menaces voilées ou explicites des dirigeants du Hezbollah de répéter les événements du 7 mai n’ont fait que confirmer ces craintes. [2] Le refus du Hezbollah de rendre les armes, et sa volonté de les utiliser contre ses adversaires politiques, ont contraint les Forces du 14 mars à des concessions considérables. [3] 



2. L’Accord entre l’Arabie et la Syrie pour que l e Liban ait un gouvernement d’union nationale, quel que soit le résultat des élections


Après les élections de juin 2009, la Syrie et l’Arabie saoudite auraient convenu à l’avance qu’un gouvernement d’unité nationale, plutôt qu’un gouvernement de la partie gagnante, serait établi au Liban. [4] Le président libanais Michel Suleiman a ajouté à cette pression en affirmant à plusieurs reprises qu’il n’approuverait aucun autre type de gouvernement. [5] 



3. Le retrait de Walid Joumblatt de la coalition des Forces 14 mars 



Depuis mai 2008, et suite à la prise (par les armes) de Beyrouth et d’autres régions du Liban par le Hezbollah – laquelle a entraîné de violents affrontements entre druzes et chiites au Mont-Liban, Joumblatt a pris la décision stratégique de céder face à la puissance dominante au Liban – les chiites – et de rejoindre l’opposition. Il a annoncé ce volte-face lors d’une réunion à huis clos tenue en la présence de loyaux cheiks druzes, auxquels il a expliqué que face à la montée en puissance des chiites, les druzes n’a vaient d’autre choix que d’accepter la coexistence – s’ils voulaient assurer leur propre survie. [6] Ce rapprochement a donné lieu à des entretiens entre Joumblatt et ses hommes d’une part, Hassan Nasrallah et d’autres dirigeants du Hezbollah de l’autre. Les récentes déclarations faites par le leader druze en faveur de la résistance et de son droit à porter les armes indiquent clairement la réalité de ce rapprochement. 

Joumblatt a également changé de position vis-à-vis de la Syrie. Le leader druze, qui jusqu’alors était considéré comme un fervent adversaire de la Syrie au Liban, ne cesse a présent de répéter que « la Syrie est la profondeur [stratégique] naturelle du Liban » et que les relations avec elle doivent être excellentes. [7] Au cours de l’année écoulée, M. Joumblatt a échangé des messages avec les dirigeants syriens, et il prépare actuellement un voyage à Damas dans le but de renouer avec les dirigeants syriens. [8] 

Le volte-face de Joumblatt a eu un impact très important sur la scène politique libanaise, en particulier au lendemain des élections parlementaires de juin 2009. Aujourd’hui, Joumblatt se déclare non affilié aux Forces du 14 mars, mais en même temps, il soutient Saad Al-Hariri, leader de faction Mustaqbal, et affirme faire partie du bloc de la majorité parlementaire. Ces déclarations n’ont toutefois aucun poids, puisque Joumblatt, compte tenu de sa nouvelle alliance et de la priorité accordée à la survie de la communauté druze, est susceptible d’adopter le point de vue du Hezbollah et de l’opposition parlementaire lors de futurs scrutins. En effet, ces derniers mois, M. Joumblatt semble s’être encore davantage rapproché de l’opposition, et en pa rticulier du Hezbollah, soutenant les positions et les exigences du mouvement chiite. Par conséquent, le volte-face politique de Joumblatt a complètement neutralisé les Forces du 14 mars en tant que majorité parlementaire, rendant vaine leur victoire aux élections. 



4. L’abandon par l’Arabie saoudite des Forces du 14 Mars au profit de la Syrie 



En janvier 2009, lors du sommet économique arabe qui s’est tenu au Koweït, le roi d’Arabie saoudite Abdallah bin ’Abd Al-Aziz, s’efforçant d’écarter la Syrie du camp iranien, a lancé une initiative de réconciliation entre l’Arabie saoudite et la Syrie, après des années de tension et de désaccords entre les deux pays. L’initiativesaoudienne tentait de parvenir à un accord sur plusieurs questions régionales, dont celle du Liban. Le dialogue en tre les deux pays a pris la forme d’une succession de réunions entre le président syrien Bachar Al-Assad et le roi Abdallah, et à Damas entre Assad et des émissaires du roi d’Arabie Saoudite, notamment le fils du roi, le prince ’Abd Al-Aziz ben ’Abdallah. 

Avant déjà les élections libanaises, la Syrie et l’Arabie saoudite s’étaient entendues pour créer un gouvernement d’union nationale au Liban. Depuis les élections de juin 2 009, la Syrie et l’Arabie saoudite sont intervenues directement pour influer sur les efforts de Saad Al-Hariri visant à créer un nouveau gouvernement, et se sont entretenues à plusieurs reprises pour parvenir à un arrangement.


Au début, il était évident que l’Arabie saoudite défendait les intérêts de ses alliés au Liban et s’efforçait de préserver leur victoire aux élections. En effet, les exigences de l’Arabie saoudite, telles que formulées dans le cadre du dialogue saoudo-syrien, coïncidaient avec celles des Forces du 14 mars. Celles-ci incluaient notamment la délimitation de la frontière syro-libanaise et l’abolition du Conseil suprême syro-libanais. La Syrie, pour sa part, a refusé d’acquiescer à ces demandes. [9] Il semble toutefois que les développements régionaux au Moyen-Orient - la puissance grandissante de l’Iran, la menace chiite yéménite contre l’Arabie saoudite, soutenue par l’Iran, les efforts du président américain Obama pour parvenir à un accord avec l’Iran, marginalisant ce faisant l’Arabie saoudite et le camp arabe sunnite, et la consolidation du régime chiite en Irak - tous ces éléments ont conduit l’Arabie saoudite à la conclusion de la nécessité d’encourager le dialogue et le rapprochement avec la Syrie. En conséquence, elle a exercé des pressions sur les Forces du 14 mars pour que celles-ci fassent des concessions en vue d’un accord qui placerait à nouveau le Liban sous tutelle syrienne. 

Dans un article du 14 novembre 2009, le chroniqueur Nicolas Nassif révèle qu’au cours du sommet des 7 et 8 octobre 2009 entre le président syrien Bachar Al-Assad et le roi Abdallah, ce dernier a exprimé le souhait que la Syrie reprenne son ancien rôle au Liban. Selon Nassif, après ce sommet, Assad aurait exercé des pressions sur ses alliés de l’opposition libanaise et accéléré la création d’un gouvernement au Liban. [10] 

En outre, Ibrahim Al-Amin, président du conseil d’administration d’Al-Akhbar, a récemment publié un article où il affirme que suite au sommet d’octobre, le roi Abdallah avait clairement fait savoir à Saad Hariri qu’il souhaitait accélérer la mise en place du gouvernement et que des concessions étaient nécessaires, alors qu’Assad avait fait comprendre à ses alliés qu’il n’attendait aucune concession de leur part. [11] Le 6 novembre 2009, Al-Safir et Al-Akhbar rapportaient que le président Assa d avait demandé au roi Abdallah de convaincre Hariri de confier à Michel Aoun le portefeuille de l’Energie. [12] Le 7 novembre 2009, Ibrahim Al-Amin écrivait que c’était le fils du roi d’Arabie saoudite, le prince ’Abd Al-Aziz ben Abdallah, qui avait fait pression sur Saad Al-Hariri pour qu’il confie à Michel Aoun les portefeuilles des Télécommunications et de l’Energie. [13] 

Un article publié par le rédacteur en chef du quotidien gouvernemental saoudien Al-Riyadh, Turki Al-Sudairi, le 13 octob re 2009, a ajouté aux pressions de l’Arabie saoudite sur Saad Al-Hariri, lequel campait sur ses positions et refusait de céder aux exigences de l’opposition. L’article suggère que l’instabilité chronique dont souffre le Liban pourrait être atténuée par la restauration du Liban à la Syrie, dont il a été séparé en vertu de l’accord Picot-Sykes des empires colonialistes. [14]

Lire le rapport intégral en anglais : http://www.memri.org/report/en/0/0/0/0/0/0/3804.htm. 




(12) Al-Safir, Al-Akhbar (Lebanon), November 6, 2009.
(13) Al-Akhbar (Lebanon), November 7, 2009.
(14) Al-Riyadh (Saudi Arabia), October 13, 2009. Two days later, Al-Sudairi published an article in which he retracted his stance and apologized. In retrospect, however, Al-Sudairi’s prediction may gradually be coming true. See MEMRI Special Dispatch No. 2595, « Al-Riyadh » Editor : « Why Shouldn’t Lebanon Return to Syria ? », October 14, 2009, http://www.memri.org/report/en/0/0/0/0/0/0/3705.htm ; MEMRI Special Dispatch No. 2598, « Al-Riyadh » Editor Retracts Call to Return Lebanon to Syria," October 15, 2009, http://www.memri.org/report/en/0/0/0/0/0/0/3708.htm.
(15) The Lebanese daily Al-Mustaqbal, owned by Sa’d Al-Hariri, stated in a February 15, 2009 editorial : « The March 14 Forces oppose the principle of the obstructing third, and will not agree to apply it in the government that will be formed after the elections, because they regard it as an ’odious invention’... If it wins (the elections) again, the March 14 Forces will not grant (the opposition) a share in the government, and will not grant anyone a obstructing third. »
An Al-Mustaqbal editorial from the following day stated : « The obstructing third was forced (on the March 14 Forces) using the leverage of (Hizbullah’s) military supremacy, as displayed by its militia on May 7... When the March 14 Forces agreed to (the principle of) the obstructing third, this was the most difficult moment (in the history of) the movement, and a moment of error... But it was clear that the majority was agreeing (to this principle only) as a temporary tactic... until the parliamentary elections are held... The Independence Movement (i.e., the March 14 Forces) opposes this (mechanism) in principle... From now on, there will be no obstructing third, regardless of the election outcome... » Al-Mustaqbal (Lebanon), February 16, 2009.
In an interview with Orbit TV, Sa’d Al-Hariri said that the purpose of the obstructing third was to paralyze the (Lebanese) state. Al-Mustaqbal (Lebanon), May 7, 2009.
Three weeks before the elections, the March 14 Forces general secretariat issued a communiqué stating that the opposition’s attempt to preserve its obstructing third in the next government was an attempt to abolish Lebanon’s (mode of) democracy. Al-Mustaqbal (Lebanon), May 14, 2009.
(16) Al-Safir (Lebanon), July 27-28, 2009 ; Al-Akhbar (Lebanon), July 30, 2009.
(17) Nassif also revealed that the 15-10-5 formula was a proposal made by the Saudis to the Syrians during their June-July 2009 talks. Al-Akhbar (Lebanon), July 30, 2009 ; August 1, 2009.
(18) Al-Hayat (London), August 14, 2009 ; Al-Sharq Al-Awsat (London), August 15, 2009, October 1, 2009 ; Al-Safir (Lebanon), November 2-3 November, 2009 ; www.nowlwbanon.com, November 2, 2009. After receiving the communications and energy portfolios, Michel Aoun began demanding the economics and social affairs portfolios as well. But Syria, which apparently decided to accelerate the formation of the government ahead of Assad’s visit to Paris, instructed Aoun to stop making demands. Al-Safir (Lebanon), November 4, 2009. On November 6, a few days before the new government was announced, the Lebanese media reported that several associates of Aoun’s had returned from Damascus all bearing the same message, namely that Syria wanted the government to be formally established within a few days. www.nowlebanon.com, Al-Liwa (Lebanon), November 6, 2009.
This recalls the unfolding of events in the wake of the May 2008 Doha Agreement. After it was decided, as part of this agreement, that a national unity government headed by Fuad Al-Siniora would be established, the two sides spent some six weeks arguing about the composition of this new government. An understanding was reached in July 11, 2009, just one day before Syrian President Assad left for France to participate in the Mediterranean Summit. Al-Mustaqbal (Lebanon), July 12, 2008.
The former editor of the daily Al-Sharq Al-Awsat and the current director-general of Al-Arabiya, ’Abd Al-Rahman Al-Rashed, wrote at the time : « (France’s) rolling out the red carpet for (Assad) was not a random act, but was the result of a series of initiatives (he has launched) in the last two months, which (France) saw as good reason to invite him and which opened before him the gates of the Elysee... In fact, Syria is displaying considerable ingenuity : it creates crises and (then) resolves them. Its fingerprints can be detected in Beirut, Doha and Gaza. (On May 7, 2008), Syria’s partner, Hizbullah, took over Beirut so that Syria could intervene and restrain it. (Similarly,) Syria’s allies in the Lebanese opposition refused to elect Michel Suleiman for president, though he was the agreed-upon candidate, (just) so Damascus could intervene and Suleiman could be (named as the next president) during (the Doha Agreement signing) ceremony. And in Gaza, Syria’s ally, Hamas, raised the level of violence vis-à-vis Israel so that (Damascus) could order it to stop. (Recently, Damascus) once again ordered its friends in the Lebanese opposition to stop sabotaging the (formation of) the Lebanese government, (and this once again occurred only) two days before (Assad’s) trip to Paris... This is Syria’s (way of) convincing (everyone) it has changed, but the truth is that has not changed a thing. It has (once again) created a crisis (in order to) resolve it. » Al-Sharq Al-Awsat (London), July 13, 2008.
(19) www.elaph.com, November 10, 2009.
(20) Minister Muhammad Fneish of Hizbullah said that that there was « no need to discuss the government’s guidelines, » because the issues of the resistance and its arms « were (already addressed) in the guidelines of the previous governments, which were agreed upon, and (today) we cannot possibly agree to less than what appeared in the guidelines of previous (governments). » www.nowlebanon.com, November 9, 2009.
(21) Al-Mustaqbal, Al-Akhbar (Lebanon), August 2, 2008 ; Al-Mustaqbal (Lebanon), August 6, 2008.
(22) For example, MP Sami Al-Gemayel of the Kataeb party said, « It is completely out of the question that the government guidelines should grant legitimacy to (Hizbullah’s weapons). » www.nowlebanon.com, November 9, 2009. Al-Akhbar board chairman Ibrahim Al-Amin assessed that the Christians in the March 14 Forces would take this position, and would demand a renewed debate of Hizbullah’s weapons as part of the national dialogue. He judged, however, that they would find themselves alone in the fray, because Jumblatt would not longer support them ; moreover, even Sa’d Al-Hariri would not be able to insist on this demand, because, « even if he agrees with them, he knows that the opposition’s price for joining the government involves more than just portfolios and ministers... » Al-Akhbar (Lebanon), November 10, 2009.
(23) Al-Safir (Lebanon), November 17, 2009.
(24) Al-Akhbar (Lebanon), November 17, 2009.
(25) Al-Akhbar (Lebanon), November 9, 2009 ; Al-Akhbar, Al-Nahar (Lebanon), November 10, 2009.
(26) Al-Mustaqbal (Lebanon), November 12, 2009.
(27) Al-Sharq Al-Awsat (London), November 13, 2009.
(28) Kayhan (Iran), November 14, 2009 ; Al-Watan (Syria), Al-Akhbar (Lebanon), November 16, 2009.
(29) Al-Safir (Lebanon), November 14, 2009.
(30) Al-Akhbar (Lebanon), November 13, 2009.
(31) Al-Akhbar (Lebanon), November 14, 2009.
(32) On November 14 and 15, 2009, Lebanese and Syrian dailies reported the impending visits of Sa’d Al-Hariri, Walid Jumblatt, and Michel Aoun to Syria. Al-Safir (Lebanon), November 14, 2009 ; Al-Watan (Syria), November 15, 2009.
(33) Al-Watan (Syria), November 17, 2009.
(34) Al-Akhbar (Lebanon), November 7, 2009.
(35) Al-Akhbar (Lebanon), November 9, 2009.



Haut de page
Réalisé sous SPIP
Habillage ESCAL 4.5.87
Hébergeur : OVH