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Discours en l’honneur du Premier Ministre d’Israël M.Benjamin Netanyahou
Richard Prasquier Président du CRIF
Article mis en ligne le 25 juin 2009

En ce moment où j’ai l’honneur de m’adresser au Premier Ministre de l’Etat d’Israël au nom de la communauté juive de France, monte en moi le souvenir de mon père. Pendant mon enfance il me parlait de l’homme qui avait enthousiasmé sa jeunesse dans la Pologne d’avant guerre depuis qu’il était venu dans la petite ville où mon père vivait. Il me disait que c’était le plus grand des orateurs de son époque. Cet homme était Vladimir Jabotinsky. Je sais ce qu’il a représenté pour vous,votre famille et votre père en particulier. Il avait dit aux Juifs de Pologne en 1938, je dis bien en 1938, "Partez, partez alors qu’il en est encore temps

. Car il sera bientôt trop tard : aujourd’hui c’est la 11e heure ; si vous ne liquidez pas la diaspora, c’est la diaspora qui va vous liquider...« . Mon père devait partir en octobre 1939, la guerre a commencé en septembre, il a survécu mais ce fut le seul de sa famille. Et me revient le souvenir des paroles du représentant israélien à Auschwitz au cinquantième anniversaire de la libération du camp : »cinquante ans plus tard, cinquante ans trop tard !...".

Il est bien des pays où l’homme qui occupe votre poste se borne, et c’est évidemment important, à des choix économiques ou sociaux qui ne mettront pas en danger, à court terme tout au moins, l’avenir de la population. Mais il n’est pas de démocratie où par ses décisions le Premier Ministre puisse influencer autant, et aussi vite, le destin de son peuple. Votre fonction est exceptionnellement difficile, l’une des plus difficiles qu’il y ait sur cette planète, car elle est vraiment existentielle. Par votre formation, votre expérience, vos lectures et vos propres réflexions, par le professionnalisme de ceux qui vous entourent, nous savons que pour lourdes qu’elles soient, ces responsabilités ne vous écraseront pas. Que la lucidité, cette lucidité qui pour les Juifs depuis si longtemps fait la différence entre le chemin de la vie et le chemin de la mort, continue de vous inspirer tout au long de votre mandat !

Vous avez voulu rencontrer la communauté juive de France. Dans votre si bref séjour, vous nous consacrez un temps précieux. Au nom de ceux qui sont venus et de ceux, si nombreux, qui auraient voulu venir et n’ont pas pu trouver de place, je vous remercie.

Cette communauté, vous la connaissez, elle est la plus nombreuse d’Europe, elle est diverse, elle est chaleureuse, elle vibre à l’unisson d’Israël. Ce n’est pas un pays qu’on apprécie de loin, qu’on ne visite qu’une fois tous les dix ans, ou jamais, c’est un pays où on part fréquemment, tous les ans ou toutes les semaines, un pays où des enfants, des parents, des frères ou des sœurs ont souvent choisi de vivre, c’est un pays qui fait partie de nous-mêmes.

Notre communauté est diverse. Le Président du Consistoire de France, le vice-Président du Fonds Social Juif Unifié, ainsi que le grand rabbin de France en vous rendant hommage viendront témoigner de notre complémentarité et de notre profonde unité.

Le CRIF est né dans les années noires de la guerre et de la chasse aux Juifs. Il représente la communauté au plan politique et il assume la diversité d’opinions des institutions et des hommes qui les représentent en son sein. Certains sont orthodoxes et d’autres sont anti-religieux, certains sont d’anciens déportés et d’autres sont des étudiants, certains sont des militants de terrain et d’autres des professionnels regroupés, certains approuvent les positions du Likoud, d’autres ont, pourquoi vous le cacher, des préférences politiques opposées. La communauté est multiple, le CRIF reflète cette multiplicité. J’ai appris, en écoutant le grand rabbin de France, que le devoir de l’homme en société n’est pas d’absorber les différences dans une stérile homogénéité mais de faire vivre leur rencontre et leurs frottements réciproques.
Nous essayons donc au CRIF de respecter cette injonction de la tradition juive et de laisser les différences s’exprimer. Oh, ce n’est toujours facile, mais il le faut pour que nous puissions jouer un rôle utile, non seulement dans la communauté juive mais au-delà pour défendre efficacement l’image d’Israël dans la société française.

Monsieur le Premier Ministre, être Juif français, c’est appartenir à un pays où les pouvoirs publics luttent fermement contre l’antisémitisme qui a resurgi, même si celui-ci n’est pas toujours reconnu quand il se cache sous des travestissements nouveaux. C’est appartenir à un pays qui a été extrêmement proche d’Israël, puis s’en est éloigné, puis est revenu à une attitude d’empathie active qui n’exclue pas les divergences d’appréciation. Nous connaissons vos liens forts avec le Président Nicolas Sarkozy, qui depuis très longtemps montre pour notre communauté un attachement sans ombre. ; vous venez d’avoir avec lui une rencontre très importante. Nous espérons qu’elle renforcera la dynamique de la paix et l’amitié entre la France et Israël.
Etre Juif français, c’est aussi vivre dans un pays où l’appartenance à un peuple pour qualifier une partie de ses citoyens n’est pas une notion évidente. « Tout pour les Juifs comme individus, rien comme nation », disait-on en 1791 quand pour la première fois des temps modernes les Juifs furent émancipés. Or, le XXe siècle a confirmé, et parfois dans l’horreur, qu’il existe un peuple juif, ce que les précurseurs du sionisme avaient déjà souligné. Ce peuple est fondé non seulement sur des pratiques religieuses, mais sur une histoire, des espérances et des fidélités communes, sur un sentiment d’appartenance qui n’exclue nullement les autres appartenances ; c’est d’ailleurs cette multiplicité qui crée les ponts qui sont un des meilleurs espoirs pour nos sociétés. Il n’y a plus guère d’israélites français qui ne se définissaient que par un attachement, virtuel ou non, à une tradition religieuse. Les Juifs français, ceux au moins qui se sentent représentés par le CRIF, se voient comme une partie du peuple juif et cela ne les empêche pas de se considérer comme d’irréprochables citoyens français.

Ce peuple juif, ce lien impalpable mais puissant qui fait que, moi Juif sécularisé, né en Pologne, je me sens tellement proche des derniers juifs du Yémen, installés depuis des millénaires et aujourd’hui encore persécutés par leurs voisins, ce peuple Juif a un Etat. Israël est l’Etat du peuple Juif : peu de groupes humains peuvent prétendre à une liaison aussi ancienne avec un territoire. Vous avez insisté sur cela, Monsieur le Premier Ministre, et je vous en remercie. Derrière le refus d’un Etat du peuple Juif se cache, nous le savons, l’espoir, un jour, d’engloutir démographiquement Israël par un retour des descendants des réfugiés palestiniens.
Qu’ils aient habité le Yémen, la Pologne, le Maroc ou Cochin en Inde, les Juifs du monde entier ont tourné pendant des siècles plusieurs fois par jour et tous les jours leurs regards, leurs pensées et leurs prières vers Jérusalem et en ont fait le lieu central de leur mémoire et le dépositaire de leurs espérances. Ceux qui ont vu les barbelés de la Jérusalem divisée et les lieux de culte juif dévastés en gardent un souvenir tragique. Aucune tradition religieuse n’a établi un attachement d’une telle force et d’une telle durée avec un lieu quelconque. Cet attachement incomparable, vous le savez, unit aujourd’hui encore le peuple Juif où qu’il se trouve dans le monde. Dans votre fonction, vous en êtes le garant.

Nous sommes Juifs, français et sionistes. Dans la lutte des mots qui, comme la lutte des images, distord la réalité du conflit, on essaye de faire du mot « sionisme » une insulte et de l’antisionisme une tendance à la mode, un processus d’explication des malheurs du monde reprenant tous les poncifs de l’antisémitisme. Répétons-le, nous sommes fiers d’être sionistes, ce qui signifie que nous considérons qu’Israël doit bien vivre comme l’Etat du peuple Juif, et nous savons que pour cela et pour longtemps, car la confiance n’est pas là, des impératifs de sécurité sont indispensables.

J’espère, Monsieur le Premier Ministre, que Dan et Ron, mes deux petits-fils israéliens, connaîtront un Israël où la paix amplifiera la créativité, l’inventivité scientifique ou artistique qui sont une caractéristique magnifique de ce pays, mais je sais que s’il le faut ils défendront leur Etat. J’espère voir ce temps où le peuple palestinien et le peuple israélien dans leurs Etats respectifs s’affronteront sur des terrains de sport et où les agitateurs du déversement de haine actuel, non seulement envers Israël ou les Juifs mais envers le monde des lumières et du progrès auront été balayés. La paix est à ce prix, il ne faut pas nous faire d’illusions. Mais pour faire la paix ans les coeurs, il faut aussi unir les modérés, leur donner la volonté de l’espoir, accepter le dialogue, lutter contre le ressentiment, le mépris et la haine de quelque côté qu’ils se développent. Nous n’oublions pas que c’est Menahem Begin qui a su faire la paix avec l’Egypte et nous espérons que vous trouverez des interlocuteurs analogues à Anouar el Sadate.

C’est une immense fierté que de voir l’intensité de la démocratie israélienne, lorsque on la compare à ce qui se passe dans la région. Ces jours-ci les masques sont tombés en Iran. Tous comprennent que ce régime ne recule pas devant les truquages et le bain de sang pour se maintenir au pouvoir pour le malheur de son peuple. Ceux qui protestent systématiquement contre Israël sont restés muets ; l’Iran gardera sa place de membre éminent d’un caricatural Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU et continuera de mentir sur son développement nucléaire.

Les mêmes resteront muets quand Gilad Shalit, auquel nous pensons tous, entamera demain sa quatrième année de captivité, alors que depuis un an sa famille n’a aucune nouvelle de lui et que nul organisme ne l’a jamais visité. Ils préfèrent nommer citoyens d’honneur des terroristes couverts du sang des civils et régulièrement jugés et détenus.

Monsieur le Premier Ministre, les défis auxquels vous avez à faire face sont d’une gravité extrême. Nous les ressentons, nous les vivons avec vous. Bonne chance, behatzlaha , pour vous, pour Israël, pour le peuple Juif et pour la cause de la paix, de la liberté et de la démocratie.



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