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Elections espagnoles - La voie à ne pas suivre
Elias Achkar
Article mis en ligne le 19 mars 2004

Chers amis bonjour ! Je suis comédien et auteur et j’écris habituellement des choses légères (sketches, pièces de théâtre) mais l’actualité m’a fait réagir. Si vous trouvez cet article pertinent vous pouvez le publier et mentionner mon nom. J’assume Bien cordialement

Après l’annonce du résultat des élections de dimanche dernier en Espagne, on a assisté à quelque chose de tout à fait étrange et inédit à ma connaissance : un parti de droite (qui plus est aux affaires) s’est réjouit du succès d’un parti socialiste ! Monsieur de Villepin a même parlé du « choix de la vérité » ! En France ça n’a pas eu l’air d’étonner grand monde.

Il est vrai qu’on n’est plus à ça près !

Le parti socialiste français quant à lui s’est empressé de féliciter le peuple espagnol, qui selon lui a sanctionné une manipulation et un mensonge d’état et donné au monde une leçon de maturité démocratique.

Rien que ça ! On pourrait expliquer cette position par un excès de jubilation immédiat, si elle avait par la suite été nuancée et atténuée par l’évocation de l’autre partie du problème, mais non : plusieurs jours après, à froid, c’est tout ce que les dirigeants socialistes retiennent de ces élections espagnoles ! Ils nous rappellent quand même que l’on se doit de combattre le terrorisme quel qu’il soit de toutes nos forces. Comment ? Sans doute en lui déroulant le tapis rouge...

De plus, nos amis socialistes nous demandent de prendre exemple sur le peuple espagnol pour aller dimanche prochain dans les bureaux de vote sanctionner le gouvernement français, qui est d’accord avec eux sur le résultat du scrutin espagnol ! C’est d’une logique implacable ! On pourrait presque en rire si ce n’était pas aussi grave. Sans compter qu’utiliser le drame de Madrid à des fins électoralistes pour un scrutin français qui n’a rien à voir est plus que discutable (pour rester poli). À la limite, cette démarche pourrait se comprendre si la « sanction » demandée portait sur le même point que dans le cas de l’Espagne -c’est-à-dire l’engagement du pays dans la guerre en Irak- mais là pas du tout : il s’agit de sanctionner le gouvernement français pour sa politique sociale ! Et pour cause, nos grands penseurs socialistes étaient en parfaite osmose avec le gouvernement pour laisser Saddam Hussein continuer à narguer l’O N U et à tuer son peuple. Il fallait selon ces braves gens trouver une solution politique. Tout le monde sait que l’on peut parfaitement discuter avec les dictateurs et leur faire entendre raison et avec celui-ci plus qu’avec un autre !

Enfin bref, passons et revenons à ces élections espagnoles. Il y a donc eu une manipulation et un mensonge d’état. Dans ces cas là, en général, ce sont des journalistes d’investigation qui parviennent à force d’obstination à trouver les témoins et les preuves pour contraindre les dirigeants à reconnaître leurs fautes. Que s’est-il passé à Madrid ? C’est le ministre de l’intérieur lui-même qui a révélé le premier élément (la fameuse camionnette) permettant de penser qu’il s’agissait de terroristes islamistes. Et quand ça ? Le soir même du 11 Mars ! C’est lui aussi qui a informé ses concitoyens des nombreuses avancées de l’enquête jusqu’au dimanche. Il y a de nombreux pays dans le monde qui aimeraient avoir de tels mensonges d’état quand le moindre de leurs opposants ou journalistes un peu dérangeants est jeté en prison pour un oui ou un non ! Je ne nie pas que le gouvernement Aznar ait privilégié la piste de l’ETA avec insistance et ostentation (pour reprendre un mot à la mode) et que c’est une faute grave, mais est-ce une raison pour ne voir que ça et ne pas se rendre compte qu’il est autrement plus grave de donner les clés de la démocratie à des terroristes ? En faisant tomber le gouvernement de son pays le peuple espagnol ne nous a pas donner une leçon de démocratie, il nous a montré la voie à ne surtout pas suivre...

J’espère que nous retiendrons la leçon, mais quand j’entends et lis les réactions de nos politiques et de certains de nos éditorialistes, j’en doute fortement... De plus, expliquer les attentats de Madrid par l’engagement de l’Espagne dans la guerre en Irak, c’est déjà commencer à trouver une justification à de tels actes, or il n’y a aucune justification au terrorisme, que ce soit à New York, Bali, Madrid ou Jérusalem. Il faudrait que tout le monde en prenne conscience une fois pour toutes, mais malheureusement on en est bien loin... À ce compte là, si l’on veut être tranquilles en France, nous n’avons qu’à retirer immédiatement la loi sur les signes religieux à l’école, nous convertir à l’Islam (pas l’Islam ordinaire ˆce serait insuffisantˆ mais l’Islam pur et dur) et voiler nos femmes en commençant par madame Chirac ! Et il y aura bien alors quelques penseurs éclairés pour venir nous dire que c’est une victoire de la démocratie.

Mais j’oubliais le grand argument que l’on nous sert pour expliquer ce vote : le peuple espagnol était en grande majorité contre la guerre en Irak. Les sondages l’ont dit (on sait bien en France que les sondages sont toujours infaillibles) et en plus il y a eu de grandes manifestations (dans lesquelles on retrouve toujours les bons citoyens qui se sont abstenus le jour des élections) : cela aurait dû suffire pour que Monsieur Aznar renonce ! Ben voyons ! Comme si un gouvernement n’était pas élu pour faire ce qu’il pense être bon pour son pays. Si la majorité du peuple est contre, il peut manifester bien sûr, mais surtout il le lui fait comprendre aux élections qui suivent. Or que s’apprêtait à faire ce peuple espagnol si farouchement hostile à son gouvernement : à lui renouveler sa confiance ! C’est d’ailleurs pour ça que les terroristes ont posé ces bombes. Si le parti socialiste avait été annoncé gagnant, ils ne se seraient pas donnés cette peine puisque Monsieur Zapatero (encore un grand visionnaire) avait promis de faire revenir d’Irak les troupes espagnoles ! Plutôt que d’insister sur la raison pour laquelle ces attentats ont été commis, il aurait été plus utile d’expliquer aux espagnols ce que les terroristes désiraient obtenir. Trouver une cause à un attentat c’est le justifier, expliquer l’effet recherché par ses auteurs, c’est le combattre.

La démocratie est le moins pire des régimes dit-on. C’est vrai et il faut le redire, mais l’histoire nous a appris que les peuples n’ont pas toujours raison (cf. Hitler au pouvoir), surtout quand ils votent sous le coup de l’émotion, de la colère, et du ressentiment...



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