" Le Pakistan a accepté samedi une offre d’assistance d’Israël pour le tremblement de terre ", a rapporté ’Associated Press’ le 15 octobre, " mais il a déclaré qu’elle devait être acheminée par les Nations Unies, la Croix Rouge, ou donnée par un fond de secours ".
A première vue, un détail insignifiant au milieu de la dévastation au Cachemire. Mais c’est une affaire sur laquelle on doit s’arrêter. Car entre les lignes, elle en dit beaucoup sur les enjeux dans la guerre entre le monde civilisé et l’Islam radical.
Le tremblement de terre de magnitude 7,6 qui a frappé le 8 octobre, a déclenché, selon les propres termes du Premier Ministre du Pakistan, " un désastre sans précédent dans l’histoire du Pakistan ". Dans un terrible bouleversement, il a tué des dizaines de milliers de gens, en a piégé ou blessé des milliers d’autres, et a laissé environ 2 millions de personnes sans abri.
Le président du Pakistan, le général Pervez Musharraf, est allé à la télévision lancer un appel urgent à l’aide internationale. Parmi les offres d’aide humanitaires qui ont commencé d’affluer vers Islamabad, il y en avait une d’Israël, qui dispose aussi de trop d’expérience en matière de secours et de sauvetage dans les désastres ; dans les 48 heures suivant le tsunami en décembre dernier, par exemple, Israël a transporté par avion des équipes d’intervenants médicaux et d’urgentistes, ainsi que 80 tonnes de fournitures, dans les pays frappés.
Mais alors que les jours passaient et que le nombre de morts pakistanais augmentait, il n’y avait pas de réponse à l’offre d’assistance d’Israël. Le ’Jerusalem Post’ rappela le tremblement de terre en Iran de 2003, quand la théocratie de Téhéran annonça qu’elle accepterait " toutes sortes d’aide humanitaire de tous les pays et de toutes les organisations internationales, à l’exception du régime sioniste ".
Le Pakistan, la deuxième nation musulmane la plus peuplée du monde, n’avait jamais établi de relations diplomatiques avec Israël, mais, contrairement à l’Iran, son attitude était supposée changer. Le 1er septembre à Istanbul, les ministres des affaires étrangères israélien et pakistanais se sont rencontrés publiquement pour la première fois ; deux semaines plus tard, Musharraf serra la main de Sharon lors d’une réception aux Nations Unies à New York. Tout aussi théâtral fut le discours conciliant de Musharraf devant le Congrès Juif Américain (AJC) le 17 septembre, où pour la première fois un dirigeant pakistanais s’adressait à une audience de Juifs américains.
Pourtant, ce n’est pas avant le 14 octobre, six jours après qu’Israël ait fait part de sa volonté d’aider les victimes du tremblement de terre " de toutes les manières possibles ", qu’il reçut une réponse formelle. Oui, l’aide d’Israël serait bienvenue, à condition d’être blanchie par une tierce partie. " Nous avons mis en place le fond de secours du président, et chacun est libre d’y contribuer ", reconnut froidement un porte-parole du gouvernement. " Si Israël devait contribuer - c’est bien, nous l’accepterions ". Israël pourrait aider à sauver des vies pakistanaises, en d’autres termes, dans la mesure où cela n’apparaissait pas trop publiquement. Il ne doit pas y avoir d’images embarrassantes d’avions avec des sigles israéliens déchargeant des fournitures de secours à l’aéroport d’Islamabad.
Et personne ne devrait imaginer que la générosité israélienne envers une nation qui a depuis longtemps été parmi ses plus sévères critiques et dans lequel l’antisémitisme est rampant, ne pourrait avoir le moindre effet sur la manière de pensée à Islamabad. Selon le ’Daily Times’, un journal pakistanais, le porte-parole insistait : " accepter une donation indirecte d’Israël ne signifiait pas que le Pakistan avait prévu de le reconnaître " ou de changer sa position envers Israël, " qui était non modifiable ".
Israël ne critiquera pas le comportement insultant du Pakistan, préférant le comprendre comme une réalité de la politique intérieure pakistanaise. Pour Musharraf, me confia un diplomate du ministère des affaires étrangères israélien, " la priorité numéro un est la survie du régime " - et tout régime quoi manquerait à traiter l’Etat juif avec le niveau de mépris approprié offenserait l’opinion publique pakistanaise.
Mais cette répugnance à l’égard d’Israël et des Juifs n’est pas un simple caprice de la politique pakistanaise. C’est une caractéristique des islamistes radicaux dont le terrorisme a répandu tant de sang à travers le monde - et qui domine plus de 70 % du Pakistan selon Tahbih Sayyed, rédacteur en chef de l’hebdomadaire ’Pakistan Today’. Musulman modéré qui ne mâche pas ses mots, Sayyed considère les récentes ouvertures de Musharraf à l’égard d’Israël comme une feinte - une tactique insincère destinée à complaire à Washington.
"C’est pourquoi il n’a rien fait pour remettre en cause la manière dont les Juifs et Israël sont dépeints par les islamistes - comme des démons, comme une force diabolique ", dit-il. Beaucoup de Pakistanais accepteraient un réel effort du sommet pour combattre la haine et les mensonges des radicaux, mais ils ne sont pas assez braves pour les combattre eux-mêmes. Ainsi, les islamistes continuent de répandre leur idéologie meurtrière.
Et c’est cela, écrit en grosses lettres, le problème au cœur de la guerre au terrorisme. " Le monde musulman est plongé dans un abîme d’obscurité, d’anti-modernité, d’anti-américanisme, et d’antisémitisme ", dit Sayyed. Il n’y a qu’une minorité de Musulmans qui sont haineux ou fanatiques. Mais une minorité peut infliger un énorme dommage si la majorité n’a pas la volonté d’agir.
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