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Nicolas Sarkozy ferait-il des émules ?
par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
Article mis en ligne le 17 août 2007

C’est la question que l’on est en droit de se poser depuis qu’il y a quelques jours le quotidien israélien Haaretz a révélé que le nouveau président Shimon Pérès avait soumis un plan de paix au premier ministre Ehoud Olmert. Certes, le régime politique israélien se rapproche plus du système parlementaire de la IVème République que du système mis en place par la Constitution de la Vème République.

Et si, à l’heure actuelle, en France, c’est le nouveau Président de la République qui, s’éloignant de la lettre de la Constitution de 1958, pratiquement, « détermine et conduit la politique de la nation », il ne peut en être de même en Israël, où en l’absence de Constitution, les Lois fondamentales ne reconnaissent au Chef de l’Etat qu’une magistrature morale, ses fonctions étant principalement représentatives.

Ce qui ne signifie nullement que le Président d’Israël doive se cantonner, suivant, la formule française à « inaugurer les chrysanthèmes » et qu’il ne puisse pas, lui aussi, faire connaître son point de vue sur les questions vitales concernant le pays.

Et du fait de son autorité morale, ses vues méritent considération.

Aussi, Shimon Pérès n’a-t-il pas, à notre avis, dépassé les limites des pouvoirs, qui lui sont reconnus, en proposant dans un plan, transmis à Ehoud Olmert, quelques jours après son entrée en fonction, la création d’un Etat palestinien sur l’ensemble de la bande de Gaza ainsi que sur 95% de la Cisjordanie, tandis que les 5% restants, où sont situés les grands blocs d’implantations, relèveraient de la souveraineté d’Israël.

Mais, bien évidemment, il y aurait lieu de déterminer quels seraient les territoires d’une superficie équivalente qui seraient reconnus aux Palestiniens, ce qui devrait être l’objet de négociations entre les parties (v. le communiqué du service de presse de l’ambassade de France en Israël, relayant le quotidien israélien sur www.desinfos.com/impression.php?id_article=7920).

Ce n’est pas la première fois qu’une telle solution est évoquée, mais, c’est à notre connaissance, la première fois qu’elle émane du Chef de l’Etat israélien.

L’originalité du plan mis en avant par Shimon Pérès réside, notamment, dans le fait qu’il envisage, comme l’une des solutions pour l’échange de territoires, que celui-ci porte sur des localités arabes israéliennes, sous réserve d’obtenir tout d’abord l’accord de leurs habitants.

S’il est vrai que les Arabes israéliens ont jusqu’à présent, généralement proclamé qu’ils n’entendaient pas quitter le giron israélien, il n’en demeure pas moins vraisemblable que la plupart d’entre eux accepteraient l’idée mise en avant par Shimon Pérès, dès lors que ce transfert serait de nature à faciliter la « coopération à grande échelle entre Israël et la Palestine, avec l’aide de la communauté internationale, pour la reconstruction des territoires palestiniens ».

Après tout, cela clarifierait la situation, car il faut bien reconnaître que, pratiquement, comme en témoignent certaines prises de position de parlementaires arabes israéliens, les Arabes palestiniens se sentent, souvent, mal à l’aise dans la situation actuelle.

D’ailleurs, selon Haaretz , les conseillers de Mahmoud Abbas auraient adhéré à ce plan.

Reste, évidemment, à obtenir le consensus de la classe politique israélienne.

Outre le fait qu’Ehoud Olmert n’aurait pas rejeté les principes de ce plan, d’après le journal israélien, un tel accord, s’il était soumis à la Knesset, bénéficierait, semble-t-il, du soutien d’au moins soixante-dix des cent vingt députés.

Il ne nous paraît pas que le comportement récent - totalement illégal, voire scandaleux - de quelques dizaines de colons irréductibles à Hébron, puisse refléter l’opinion publique majoritaire en Israël.

Pas plus d’ailleurs que les gestes violents de ceux qui s’opposèrent voici deux ans à l’évacuation de la Bande de Gaza.

Certes, le déferlement, depuis la mise en Å“uvre de cette décision, de roquettes sur les localités israéliennes donne, apparemment, raison à ce refus d’obéir aux ordres d’un gouvernement bénéficiant du soutien d’une majorité à la Knesset, démocratiquement élue.

Mais, ce n’est qu’une apparence, même si les souffrances des habitants de Sderot, notamment, constituent une triste et dure réalité.

De fait, la décision prise par Ariel Sharon était dictée par le bon sens et la nécessité, au même titre que le retrait opéré du sud-Liban, quelques années auparavant, même si ce retrait avait enhardi l’opposition d’Arafat à toute solution pacifique et l’avait conduit à initier le déclenchement de la seconde Intifada .

Ce n’est pas parce que, tant du côté palestinien que du côté israélien, une minorité se refuse à envisager des compromis de nature à aboutir à un règlement du conflit qu’il faut désespérer d’y parvenir.

L’avantage c’est que du côté israélien, les autorités disposent, effectivement, et heureusement, des moyens de faire respecter la loi et l’ordre, alors que du côté palestinien, on attend encore que l’Autorité palestinienne mérite, enfin, son appellation.

Mais, il n’y pas lieu de désespérer.

Rappelons-nous que le 19 février 2005, Ariel Sharon, pourtant considéré comme un « faucon » se déclarait prêt à des « concessions douloureuses » pour une paix authentique avec les Palestiniens, sous réserve de la sécurité des Israéliens.

C’est au titre de ces « concessions douloureuses » qu’il faut également ranger la proposition faite, plus récemment, par Shimon Pérès - et rapportée par Maariv de libérer des prisonniers palestiniens pour relancer le processus de paix (www.desinfos.com/impression.php?id_...).

Il est évident que la libération récente de 256 prisonniers palestiniens ne peut constituer qu’une amorce modeste dans cette voie.

Mais Shimon Pérès a pris soin, en soulignant d’ailleurs qu’il n’avait aucune intention, (nous ajouterons « lui ») d’empiéter sur le domaine du gouvernement, de préciser que son action se fait en concertation avec celui-ci et avec le Premier ministre Olmert.

Et surtout il a conditionné la mise en Å“uvre d’une libération massive (2 000 prisonniers par an sur 5 ans) à la prise et (et nous ajouterons, modestement) surtout à la tenue d’engagements précis par l’Autorité palestinienne concernant la réforme de ses forces de l’ordre et la lutte contre le terrorisme.

Il est évident qu’on en est encore loin, mais le fait que des propositions d’apaisement soient faites du côté israélien devraient inciter les dirigeants palestiniens à se doter des moyens d’y parvenir, et ce avec l’aide la communauté internationale, qui, jusqu’à présent, n’a pourtant pas lésiné sur ce point,

Mais, depuis 1993, date du début d’une normalisation des rapports entre Israéliens et Palestiniens, les dirigeants de ceux-ci ont - et le cas d’Arafat en est la preuve éclatante - été davantage intéressés par les avantages matériels qu’ils pouvaient en retirer plus que par le souci de contribuer au bien-être de la population.

Nous avons souvent répété - ici même - que suivant l’adage « ventre affamé n’a pas d’oreilles » (ou plutôt risque d’être attiré par les mauvais génies) que seule une amélioration du niveau de vie de la population palestinienne serait de nature à atténuer le sentiment anti-israélien, hélas majoritaire au sein de la population, surtout parmi les jeunes.

N’oublions pas - mais ce n’est qu’une explication et non une excuse - que c’est la crise économique du début des années 30, qui a favorisé l’avènement du nazisme en Allemagne.

De même, le terrorisme et les idéologues islamistes qui l’instrumentalisent, trouvent un terreau favorable dans le sous-développement de la Bande de Gaza, et dans une moindre mesure, en Cisjordanie.

Et cela relève de la responsabilité de l’Autorité (sic) palestinienne.

Tel est le message que la communauté internationale se doit de faire passer, plutôt que de persévérer à distribuer aux deux parties des cartons jaunes, voire rouges.



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