
Des responsables arabes israéliens entravent la distribution de Charlie Hebdo en Israël. Liberté d’expression répond Israël Beytenou, parti d’Avigdor Liberman, décidant de le distribuer gratuitement. Le très virulent député arabe israélien Ahmed Tibi obtient un jugement le lui interdisant. Jugement de Salim Joubran, qui préside la Commission des Élections. Israël Beytenou ira devant la Cour Suprême. Ironie de l’histoire : une journaliste de l’hebdomadaire s’insurgeait contre la présence de Benyamin Netanyahou à la marche de Paris, le vilipendant lui et Israël, estimant qu’en tuant Charb les tueurs « n’ont pas rendu service à la oumma »...
Israël et la liberté d’expression : la censure de Charlie Hebdo vient d’Arabes israéliens
Bel exemple de la vigueur de la liberté d’expression en Israël. Confrontée à de violentes réactions de députés et responsables arabes israéliens Steimatzky, une chaîne de librairies israéliennes, avait renoncé à vendre Charlie Hebdo dans ses boutiques, préférant le faire discrètement en ligne. Le parti du ministre Avigdor Liberman avait alors décidé de le distribuer gratuitement. Mais on est en période électorale en Israël...Le très virulent député Ahmed Tibi s’est donc adressé au Juge Salim Joubran, qui préside la Commission des Élections. Protestant contre une distribution de cadeaux par un parti politique mais avertissant également qu’offrir ce dernier numéro de l’hebdomadaire satirique français – avec en couverture une représentation de Mahomet, une larme à l’œil, disant pourtant « tout est pardonné » - offensait les musulmans. Le juge a interdit qu’il soit distribué. Le Jerusalem Post qui suit l’affaire rapporte que le parti, qui avait ouvert un stand de distribution, voit dans cette décision une entrave à la liberté d’expression et va donc porter l’affaire devant la Cour Suprême.
Ironie de la situation
Ce qui rend cette affaire tout particulièrement ironique est que l’une des journalistes de Charlie Hebdo, Zineb El Rhazaoui, lors de nombreuses interventions publiques, soit au Québec où elle est allée en tournée et a été un temps la coqueluche des médias, soit dans une interview télévisée dans une émission tunisienne, mis à part un plaidoyer pour liberté d’expression et laïcité, n’a eu de cesse de s’indigner de la présence de Benyamin Netanyahou lors de la marche de Paris du 11 janvier 2015 dans la foulée du massacre d’une partie de l’équipe de Charlie Hebdo, du meurtre de policiers ainsi que de Juifs faisant leurs courses dans une épicerie casher de la Porte de Vincennes. A ce propos, sauf erreur de notre part, il ne semble pas que Zineb El Rhazaoui n’ait mentionné cette prise d’otages ou ces assassinats ou qu’elle ne le fasse qu’une seule fois lors de son interview pour une émission tunisienne. Elle y dit non sans véhémence, toujours à propos de Benyamin Netanyahou, : « C’est moi qui l’ai amené Netanyahou ? Coulibaly qui a tué les Juifs, c’est lui qui l’a amené...la presse française dit qu’il s’est imposé à François Hollande quand les Juifs ont été tués et que Hollande a alors invité Abbas ».
Son indignation contre la présence du Premier ministre israélien allant généralement de pair avec une dénonciation, en passant, de la présence d’une délégation saoudienne et parfois la mention vague de « chefs d’états » de pays où la liberté d’expression n’est pas respectée. Sans précisions. Son opprobre visant tout particulièrement le chef du gouvernement israélien, pays qu’elle a décrit par ailleurs comme « colonial et raciste ».... Ce qui se passe aujourd’hui en Israël à propos de l’hebdomadaire montrant le peu de perspicacité de ses analyses en la matière...
On a des doutes également sur le bien fondé des analyses de celle qui parle au nom de Charlie Hebdo lorsqu’elle fustige les islamistes et l’islamisme alors que la plupart des responsables arabes israéliens s’étant opposé à la vente de l’hebdomadaire ne sont pas considérés comme tels, Tal étant même un parti politique laïque..
« Pro-palestinien », Israël, « État colonial et raciste » ?
Autre volet ironique et absurde de cette affaire : cette même journaliste déclarait dans une interview pour une émission tunisienne que Charb, directeur de Charlie Hebdo, « a été assassiné par des gens qui n’ont pas rendu service à la oumma », précisant à quel point il était proche des Palestiniens – et elle, voire toute la rédaction, l’étant donc aussi -.
Or, il semble évident que dans ce qui serait donc un État « colonial et raciste » selon elle, et tant pis pour l’absurdité, les députés Masoud Gnaim du parti arabe israélien United Arab List, militant pour un État palestinien avec une frontière sur les Lignes de 67, la Bande de Gaza et Jérusalem Est comme capitale, ou qu’Ahmed Tibi, ancien conseiller de Yasser Arafat, député du parti arabe israélien Tal, se décrivant comme « patriote palestinien » ou connu pour ses outrances anti-israéliennes n’ont pas du tout la même vision des choses que la journaliste.
Ce sont eux, entre autres responsables arabes israéliens, qui ont fait pression sur une chaîne de librairies israéliennes au point qu’elle ait dû renoncer à mettre en vente l’hebdomadaire dans ses succursales. Bel exemple de souci de liberté d’expression ! Ce sont eux encore qui en ont fait interdire la distribution gratuite. Et l’affaire est loin d’être finie.
On a là un exemple particulièrement frappant de l’absurdité de la grande majorité des prises de position, actions, manifestations d’un courant s’affirmant résolument « pro-palestinien »