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La commission Stasi préconise une loi pour interdire les signes religieux « ostensibles » à l’école
Article mis en ligne le 11 décembre 2003

Au terme de plus de six mois de travaux, la commission Stasi sur la laïcité s’est prononcée jeudi en faveur d’une loi comprenant un volet « fermeté » et un volet « ouverture » pour interdire le port « ostensible » des signes et tenues vestimentaires religieux ou politiques dans les établissements scolaires publics. Les signes « très discrets » seront en revanche autorisés.

« La commission a demandé qu’un coup d’arrêt soit aujourd’hui porté à des dérives qui menacent très directement le service public de l’école », a exposé le rapporteur de la commission, Rémy Schwartz, lors d’une conférence de presse au Sénat. « Pour les écoles, collèges et lycées, la commission a proposé que soient interdits toute tenue vestimentaire ou tout signe manifestant une appartenance politique ou religieuse ».

En clair, « les signes ou tenues manifestant une appartenance politique ou religieuse » tels que le voile, la kippa et les grandes croix seront « strictement interdits ». En revanche, les « signes très discrets d’intimité » que sont les médaillons, les petites croix, les étoiles de David et les mains de Fatma seront « autorisés », car ils constituent une simple « confirmation de la foi ».

Cette obligation légale ne concernera pas les écoles privées sous contrat avec l’Etat, mais elle s’appliquera aux établissements scolaires publics d’Alsace-Moselle régis par le régime du Concordat. Mais « il n’est pas question » de toucher à ce dernier, a tenu à préciser le président de la commission Bernard Stasi.

Enfin, des « règles » seront posées « très clairement » par la loi pour enrayer certaines « dérives » dans les écoles : le non-respect des règles d’assiduité, la contestation de certains enseignements comme l’histoire de la Shoah ou le refus d’être examiné par une femme médecin.

Si elle a polarisé l’attention ces derniers mois, la question des signes religieux à l’école n’est qu’un des aspects de la loi, qui porte sur l’ensemble des services publics. Le foulard islamique n’est qu »’un aspect du problème », a souligné M. Stasi. Les sages souhaitent également que la loi rappelle le nécessaire respect du « principe de neutralité » à tous les agents publics. A l’hôpital, ils veulent que les impératifs de santé l’emportent sur les considérations religieuses pour qu’il ne soit plus possible, par exemple, de refuser d’être soigné par un médecin en raison de son sexe ou de son patronyme.

Au volet « ouverture », la commission propose que la loi fasse des fêtes religieuses de l’Aïd el-Kébir et de Yom Kippour des jours fériés dans tous les établissements scolaires. Dans les entreprises, les salariés pourraient choisir un jour de fête religieuse sur leur crédit de jours fériés. Enfin, les « sages » proposent la création d’un « établissement national d’étude de l’Islam » pour « assurer dans notre pays une réflexion rationnelle et laïque sur l’Islam ».

« Cette loi n’est pas une loi d’interdiction, mais c’est une loi à certains égards d’ouverture », a assuré M. Stasi, « il fallait qu’indiscutablement on marque un coup d’arrêt ». « Il y a en France (...) des forces qui cherchent à déstabiliser la République », a-t-il dit. « Il est temps que la République réagisse, que la République marque ses limites et s’affirme, mais tout cela dans le respect de la différence, dans le respect des religions », a-t-il conclu.

Enfin, à côté de la loi, la commission fait plusieurs propositions pour assurer le respect de la diversité spirituelle en France. Rémy Schwartz a notamment insisté sur la nécessité de « ne plus mettre d’obstacles » à la construction des mosquées et synagogues et de faciliter les abattages rituels et les rites funéraires.

Les Réactions

L’Union des étudiants juifs de France a « applaudi des deux mains » les propositions de la commission Stasi tout en formulant ses réserves sur une loi qui n’inclut pas suffisamment selon elle « la sphère privée ». « Le travail de la commission Stasi a été remarquable en terme d’objectivité et de parcours, si la loi va dans le sens de son rapport, la République y gagnera mais on ne peut se détourner de la sphère privée », a déclaré Patrick Klugman, président de l’association. Il va y avoir « un nouveau champ de bataille, c’est l’entreprise », a-t-il estimé, se félicitant néanmoins des propositions avancées concernant notamment l’école et les services publics. « Pour moi, le travail de la commisison Stasi est une dynamique salvatrice », a-t-il conclu.


Le président de la LICRA
(Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme), Patrick Gaubert a estimé que les propositions de la commission Stasi sur la laïcité sont « sages » et « amèneront à plus de sérénité ».
« Les propositions de la commission Stasi (qui a remis son rapport jeudi à Jacques Chirac) sont sages et amèneront à plus de sérénité surtout à l’école », a estimé M. Gaubert. « La LICRA n’est pas pour une loi sauf en dernier recours à condition qu’elle soit sage. Là, les propositions ne nous choquent pas ».
« Interdire les signes ostensibles, c’est la sagesse, c’est exactement ce qu’il faut faire », a-t-il dit.
De même, la proposition d’interdire aux usagers des hôpitaux de récuser du personnel soignant « est le minimum que l’on peut attendre » a-t-il poursuivi.

M. Gaubert ne voit en revanche « pas l’intérêt » de décréter fériées les fêtes religieuses juive de Kippour et musulmane de l’Aïd-el-Kebir « dans toutes les écoles de la République ».
M. Gaubert s’est félicité du fait que la commission « ne soit pas restée sur le problème de l’école mais soit allée plus loin », évoquant notamment les propositions faites dans le domaine des administrations. « Rien ne nous choque, il y a même des avancées, c’est tout à fait positif », a-t-il dit.
Le président du MRAP
Mouloud Aounit a estimé que la loi préconisée par la commission Stasi serait « inutile et inefficace ».
« Je persiste et je signe : rien aujourd’hui ne justifie la mise en place d’une loi pour une dizaine de cas (de voile islamique), alors que la majorité des cas sont réglés par le dialogue », a déclaré M. Aounit, estimant qu’une loi à l’école était « complètement disproportionnée, inutile et inefficace ».

A travers les conclusions de la commission Stasi, « c’est quand même bien une religion qui est montrée du doigt, l’islam », a-t-il dit, se disant « terriblement inquiet des conséquences » d’une éventuelle loi.
« Je crains que l’exclusion ne l’emporte sur le dialogue, et dans un contexte déjà tendu aujourd’hui, ce type de loi ne va pas détendre les relations », a-t-il ajouté.
M. Aounit s’est en revanche félicité de la proposition de la commission d’inscrire les fêtes religieuses juive de Kippour et musulmane de l’Aïd-el-Kebir dans les calendriers des jours de congé des « écoles de la République ».
Le président de SOS-Racisme
Dominique Sopo a estimé quant à lui que les propositions de la Commission Stasi sont « bonnes » en matière de laïcité mais qu’elles restent « floues » sur la manière de répondre au « problème du communautarisme ».

« A SOS-Racisme, nous sommes favorables à l’interdiction des signes religieux visibles. Donc la proposition est bonne même si nous ne sommes pas pour une loi mais plutôt pour une circulaire moins solennelle », a dit M. Sopo.
« Cela permet de répondre à des situations qui étaient renvoyées de façon hypocrite aux enseignants sans cadre juridique. Là au moins, les enseignants sont adossés à une règle claire, ils n’ont pas à interpréter », a poursuivi M. Sopo ajoutant que « le voile en plus d’être un signe religieux est un signe politique qui renvoie au communautarisme et aux droits de la Femme ».
Le rapport propose aussi un « rappel utile des règles de la laïcité » aux parents et aux élèves, selon M. Sopo, car « si l’on veut apaiser les tensions, il faut une vision plus large, ce qui est le cas », a-t-il dit.

La commission a « raison de clarifier » les règles dans les hôpitaux où la commission préconise l’interdiction pour les usagers de récuser du personnel soignant, a-t-il poursuivi.
« La commission a fait un travail de qualité, sans vision étroite, avec notamment la proposition de détruire les ghettos mais sur la discrimination et la ghettoïsation les recommandations sont plus floues et d’ordre général », a-t-il enfin déploré.
Le principal syndicat d’enseignants des collèges et lycées, SNES-FSU,
craint pour sa part « d’avantage d’exclusions » dans les établissements scolaires « où aujourd’hui le dialogue a prévalu » si le texte de loi recommandé par la Commission Stasi était adopté.

« Si ce texte était adopté, il ne résoudrait pas tous les problèmes sur le terrain et risque de conduire à d’avantage d’exclusions, là où aujourd’hui le dialogue a prévalu » a déclaré à l’AFP, le secrétaire général du SNES-FSU, Denis Paget après la remise du rapport au président de la République.
« Pour nous, c’est toujours la logique éducative qui a été privilégiée, la nécessité de convaincre les jeunes de l’importance de la laïcité en les formant et en dialoguant avec eux », a-t-il ajouté.
Il a néanmoins salué comme « intéressantes » les propositions émises sur la destruction des ghettos scolaires, l’accès à l’école publique dans toutes les communes, l’enseignement complet de parties d’histoires peu glorieuses.

« Mais la Commission ne remet pas en cause fondamentalement des règles et lois qui portent en elles-mêmes atteinte à la laïcité, comme le statut dérogatoire de l’Alsace-Moselle, le décalque du calendrier scolaire sur le calendrier religieux ou le caractère propre de l’enseignement privé sous contrat », a-t-il regretté.
« Autre exemple complètement ignoré de la commission, tout ce qui se passe autour des enjeux économiques de l’école est complètement sous-estimé voire ignoré, or pour nous, la laïcité signifie que l’école doit rester indépendante de toute influence religieuse, sectaire, politique et économique », a ajouté M. Paget



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