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L’introspection comme prérequis à la paix
Yossi Halevi Klein, New-York Times
Article mis en ligne le 28 septembre 2003
dernière modification le 3 octobre 2003

Jérusalem - En ce jour de Rosh Hashanah, époque de l’année réservée à l’examen de conscience, j’avoue qu’en tant qu’israélien ma capacité à l’autocritique a été épuisée.

La guerre terroriste déclenchée autour de Rosh Hashana il y a deux ans et qui engendra des campagnes officielles de haine anti-juive à travers le monde arabe a convaincu beaucoup d’Israéliens comme moi, prêts à faire pour la paix des compromis importants, que peu importe la quantité de territoire que nous sommes prêts à concéder, l’Etat d’Israël ne sera jamais accepté au moyen- Orient.

Il fut pourtant un temps où j’étais plutôt prêt à aboutir à d’autres conclusions. Pendant la première Intifada qui débuta à la fin de années 80’, je servais comme réserviste dans un camp de réfugiés de Gaza. Un mois par an, je devenais un occupant, faisant irruption dans des chambres à coucher familiales au milieu de la nuit pour mettre en état d’arrestation des suspects de crimes allant du terrorisme au non paiement de taxes.

Cette expérience m’a enseigné que les deux camps partagent largement les torts et les raisons. J’étais loin d’être seul. La première intifada avait réduit à une minorité les tenants de la ligne dure qui croyaient que seul le peuple juif avait des droits légitimes sur cette terre. La majorité d’entre nous avait fini par apprendre à s’adapter à un récit concurrent. Nous neutralisions notre attachement aux territoires bibliques et acceptions l’inévitabilité du démantèlement de la plupart des implantations de Cisjordanie. Nous offrions de partager notre plus précieuse possession, Jérusalem, avec notre pire ennemi, Yasser Arafat.

Pour moi, ce processus d’examen de conscience signifia entreprendre un voyage en Islam et en Chrétienté. En tant que juif religieux, j’ai été en pèlerinage dans des mosquées et des lieux saints, cherchant à faire des expériences de ces autres vies religieuses coutumières de mes voisins. Je me suis joint aux rangs de prière musulmane et y ai appris son pouvoir par l’abandon chorégraphié. J’ai aussi prié dans un camp de réfugié que j’avais patrouillé comme soldat.

En retour, j’attendais des Palestiniens la reconnaissance du fait que je n’étais pas un croisé ou un colonisateur mais un fils exilé de retour chez lui. J’attendais des leaders Palestiniens qu’ils disent à leur peuple ce que feu Yitzhak Rabin nous a dit à nous : que nous devions nous retirer de notre prétention exclusive à la terre. Ces mots ne sont jamais venus.

Peu de Palestiniens semblent préparés, même maintenant, à cet examen de conscience de leur part de responsabilité dans le conflit. Au lieu de quoi, la plupart restent barricadés dans une vision auto-légitimante de l’histoire qu’ils départagent en gardant intégralement pour eux la part d’innocence et en nous réservant à nous seuls la part de blame. Peut-être leur incapacité à reconnaître la complexité historique de ce conflit est intelligible : les Palestiniens, après tout, en ont été les perdants. Pourtant cet échec les a conduit à commettre leur plus grand raté dans une histoire riches en occasions manquées. En déclarant la guerre il y a deux ans contre le gouvernement israélien le plus à gauche de son histoire, il ont fait passé des Israéliens comme moi de supporters d’Ehud Barak à supporter d’Ariel Sharon.

Ce que la première intifada fut pour les Israéliens, il eu fallut que celle-ci
le fut pour les Palestiniens : un moment privilégié d’examen de conscience. Le processus d’Oslo a échoué à cause d’une asymétrie dans l’auto-critique : seul un des deux camps a pris conscience qu’il était impliqué dans un conflit entre deux mouvements nationaux légitimes. Le moment est venu pour les Palestiniens d’accepter un plan de partage de leur vision de la justice historique. Ils doivent admettre qu’une part importante de leur souffrance, particulièrement maintenant, a été auto-infligée. Et ils doivent cesser d’esquiver la déliquescence morale récurrente de leurs leaders, depuis le soutien d’alors à l’Allemagne Nazie jusqu’à l’alliance avec Saddam Hussein.

Pourtant jusqu’ici, il y a peu de signes de sursaut moral. Une annonce placée au début de l’été [juin 2002] par des intellectuels palestiniens demandant instamment la fin des attentats-suicides parce qu’ils étaient inefficaces n’est pas assez. Peu de Palestiniens ont tenté de défier le révisionnisme historique de plus en plus prévalent dans la culture arabe qui dénie à la fois les racines immémoriales des Juifs sur cette terre, l’existence des chambres à gaz et même l’implication arabe dans les attentats du 11 septembre.

Lors de mon voyage en Islam palestinien, j’ai rencontré la profonde capacité musulmane de vivre sa vie quotidienne avec une conscience permanente de sa propre mortalité - une conscience qui peu engendrer l’humilité, un prérequis à la réconciliation entre ennemis. La paix viendra seulement par introspection et expiation mutuelle des deux côtés. Beaucoup d’Israéliens ont été très loin dans la recherche d’une compréhension des revendications et des griefs palestiniens.
Afin que ce processus nécessaire puisse reprendre maintenant parmi les israéliens, il est désormais requis des Palestiniens qu’ils engagent eux aussi un réel débat interne d’auto-critique morale.

Yossi Klein Halevi, correspondant israélien de The New Republic, est l’auteur de « At the Entrance to the Garden of Eden : A Jew’s Search for Hope with Christians and Muslims in the Holy Land. » (« A l’Entrée du Jardin d’Eden : Un Juif à la Recherche de l’Espoir avec Chrétiens et Musulmans en Terre Sainte. »)

©CID pour la traduction



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