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Nouvel Observateur - N°1883 - Semaine du 07 décembre 2000
Pour moi, Être juif en France, c’est... « La chose la plus agréable et la plus attristante »
Alexandre Adler - Historien, journaliste
Article mis en ligne le 7 décembre 2000
dernière modification le 9 juillet 2003

Etre juif aujourd’hui en France est la chose la plus facile et la plus agréable qui soit au monde. Une société exceptionnellement tolérante, qui n’oppose plus guère de barrières à l’ascension sociale des juifs talentueux, une Eglise catholique exemplaire, qui fut dès les années 50 à l’avant-garde des transformations du monde chrétien, qu’a exprimées de manière bouleversante Jean-Paul II lors de son voyage en Israël. Une langue, enfin, qui de Proust à Perec, de Max Jacob à Albert Cohen, a prêté sa merveilleuse ductilité à des oeuvres juives essentielles à l’intelligence de nous-mêmes.

Etre juif en France, c’est malheureusement aussi la chose la plus attristante aujourd’hui. Sans doute l’alliance de notre défunte IVe République et d’Israël avait-elle quelque impureté qui se manifestera clairement à Suez. Mais depuis lors, c’est sans mesure que la France s’abandonne à une politique de vitupération et de rejet d’Israël qui atteint profondément notre intégrité de citoyens et de patriotes français. Et dans ces cas-là, rien n’est plus épuisant, rien plus humiliant que d’avoir à combattre pour soi-même, alors que tant d’autres batailles communes nous sollicitent. Même les débordements, parfois exagérés, de notre expression du « droit à la mémoire », s’agissant de Vichy, sont un contrecoup, souvent inconscient, de l’outrage quotidien qui est fait à Israël. Il ne s’agit pas ici de dénier l’intérêt d’une politique arabe de la France, ni de réclamer un alignement : mais sait-on ici combien le rejet de l’accord de paix par un Yasser Arafat, une nouvelle fois incohérent, une nouvelle fois fasciné par la bagarre qui s’annonce, ne correspond en rien aux intérêts des régimes arabes vraiment orientés vers le dialogue avec la France, de l’Algérie à Oman ?

Certes, le grand rabbin Zadoc Kahn trouvait au début de l’affaire Dreyfus que, « juifs et antisémites, nous étions tous unis par le même amour de la France ». C’est sans doute vrai, aujourd’hui encore. A condition de se rappeler qu’il y avait à l’époque quelques jeunes israélites qui pensaient plus loin et plus juste, ils s’appelaient Léon Blum, Bernard Lazare, Joseph Reinach, Jules Isaac, Marcel Proust. Ils se sont redressés. Aujourd’hui il faut faire de même.



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